Après Halloween 2, son film 'malade', profondément original et impressionnant, Rob Zombie aggrave son cas. Lords of Salem, son cinquième long-métrage, est un délire d'aspect tellement brouillon qu'il en deviendrait hermétique. Ce programme inspiré du procès des sorcières de Salem (1692) a reçu un accueil très mitigé et réussi à rendre perplexes les fans d'Halloween ou de Devil's rejects. Il n'est même pas sorti en salles chez les bouffeurs de grenouilles. Le dédain des distributeurs pour le cinéma 'de genre' va donc jusqu'à inclure son élite ; The Lords of Salem n'est pas une réussite catégorique, mais il est tout de même le fruit d'une sommité et la signature est bien là.
C'est d'ailleurs elle qui donne à Lords of Salem tout son éclat de blockbuster du bis hargneux, où la sorcellerie est une religion rédemptrice pour marginaux. Le programme est assez random : à certains moments Rob Zombie s'amuse à rendre les enchaînements précipités, prenant la lisibilité avec désinvolture. Il ne floue pas directement les repères, mais l'effet est similaire. Cette négligence dans la structure, en tout cas dans la narration, est à la mesure du brio et de la précision dans l'exécution. Zombie a une intelligence visuelle inouie et sait engendrer des images malicieuses et puissantes. Cette aptitude se ressent en toutes choses, notamment la façon de poser de poser les scènes : des situations parfois idiotes ou triviales fonctionnent grâce à ce flair.
Zombie travaille des rythmes mais délaisse leur coordination. Lords of Salem évite toujours, éventuellement de justesse, l'ennui mais son manque de liant plombe toute tension de fond. Cette œuvre flamboyante recèle de grandes inspirations, une folie maîtrisée, mais manque de substance et Zombie se retrouve à triturer en tous sens de maigres gimmicks. Le résultat a un goût paradoxal, tendant à la gaminerie, mais présentant un folklore sur-mesure, aussi voisin du poisseux rutilant d'un Toolbox Mulders que de la subversion maniérée d'un Kenneth Anger. La libération des démons en bout de course permet à Zombie d'exulter sa générosité ; le film tenait du Ken Russell très modéré à l'ère d'American Mary, il s'embarque dans des échappées carrément dignes, en terme d'effusions, d'Au-delà du réel ou des Diables.
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