Ce DVD nous retrace l’histoire et la carrière de Miles, de ses débuts à St Louis jusqu’à sa mort en 1991. On connaît sa carrière extraordinaire durant laquelle il n’a jamais voulu se répéter, du bebop des débuts aux côtés de Dizzie Gillespie et Charlie Parker jusqu’au jazz pop funk des dernières années (« Tutu » et les reprises de « Human Nature » et « Time after Time »), en passant bien sûr par le jazz fusion rock électrique des années 70. L’avantage de ce documentaire est qu’il est complet, durant plus de 2h avec des magnifiques extraits de concert (Copenhague 1969 avec Dave Holland, Jack DeJohnette…). L’autre avantage, ce sont les intervenants invités, à commencer par Miles lui-même à travers des interviews de 1985-86 et 89. Mais aussi beaucoup des musiciens qui l’ont accompagné, plus ou moins longtemps, Herbie Hancock, Ron Carter, René Urtreger, Dave Holland, Marcus Miller, Clark Terry, Jimmy Cobb, John Scofield, Chick Corea, Keith Jarrett, John McLaughlin entre autres, un casting prestigieux et tous sans exception ont été marqués à vie par leur rencontre même si l’aventure a parfois été compliquée, Miles n’ayant pas la réputation d’être quelqu’un de facile, ni dans la musique, ni dans sa vie privée, ses 2 premières femmes en témoignent d’ailleurs.
Le portrait est loin de n’être qu’élogieux, son ex-femme, Frances Davis nous disant « Le génie de Miles réside dans sa vie, pas dans sa façon de vivre », un homme excessif, entier, colérique, parfois violent et qui ne laissait rien passer à ses musiciens, les renvoyant du jour au lendemain s’il estimait qu’ils ne lui étaient plus utiles pour faire avancer sa musique. DeJohnette raconte qu’à la fin des années 60, il voulait être auprès de sa femme qui allait accoucher alors que Miles avait décidé que le groupe partirait en tournée. DeJohnette l’a suivi, sa femme en coulisses, mais les engueulades entre eux ont été de plus en plus fortes jusqu’au départ de Jack. Pour Miles, rien ne devait s’interposer entre lui et la musique, pas même la famille. Sa fille évoque les relations très conflictuelles que ses enfants ont eu avec lui et encore, elle est la seule à témoigner, ses frères ayant fini par se fâcher définitivement avec leur père…Le documentaire très classique dans sa forme, sans fioriture (on suit la chronologie), s’achève sur les querelles d’héritage, Miles n’ayant rien laissé à ses 1ers enfants. On peut oublier cette partie et garder en mémoire un artiste exceptionnel, complexe et fascinant qui a aussi développé le dessin et la peinture comme moyens d’expression.