Film original et émouvant signé Toshiya Fujita (Stray Cat Rock, Lady Snowblood) et produit par Toshirô Mifune. Sur l'île d'Okinawa, en pleine guerre des gangs, un jeune yakuza voit tour à tour son organisation dissoute et son meilleur ami assassiné sauvagement. En représailles, il tue le patron du clan rival. Contrairement au code de l'honneur des yakuzas qui veut que le meurtrier se rende aux autorités après son crime, Joe, qui n'a plus rien à perdre dans ce monde, décide de prendre la fuite et de se réfugier aux Philippines, d'où est originaire son père.
Sur ses 2h13, le film se décompose en deux parties. Dans un premier temps on suit la cavale de Joe façon road movie, parcours exotique à travers les îles d'Okinawa, Yonaguni, puis les Philippines. Durant la deuxième heure il refait sa vie aux Philippines où sont implantés quelques yakuzas qui trafiquent vers le Japon de la drogue et des filles. Et c'est là que le film prend toute sa saveur. Tournage en conditions réelles dans un pays qui vivait les dernières heures d'une dictature militaire (Marcos), au milieu des petits trafics et de ce qui était considéré comme le plus grand bidonville d'Asie (Tondo à Manille). En trame de fond la quête identitaire de Joe, discriminé pour sa couleur de peau "noire" au Japon, et étranger aux Philippines (on s'adresse à lui en anglais même lorsqu'il fait l'effort de parler le tagalog). En prime une chanteuse de cabaret philippine qui interprète du Sayuri Ishikawa.
Il paraît que le tournage aux Philippines fut épique. Ambiance pesante. L'actrice principale rentrée au Japon avant la fin du tournage. Certaines prises de vue ont été précipitées ce qui donne un joli cafouillage dans la séquence finale. En revanche Fujita est toujours impeccable derrière la caméra et réserve quelques beaux plans où il sait insuffler la magie des lieux et l'atmosphère de son époque. Un réalisateur qui gagnerait à être plus connu.