J'ai choisi de voir Oculus parce qu'en tant qu'amateur d'épouvante, quand un petit film commence à faire parler de lui avec cette ampleur, on a envie de se laisser aller à espérer. D'une part parce que ce genre de bouche-à-oreille nait dans les festivals spécialisés et donc se propage en premier lieu par les spectateurs avertis et passionnés, mais également parce qu'on peut présumer qu'un tel produit présente une forte identité qui lui est propre - éloignée du patron prédécoupé des blockbusters basiques.
Voilà pourquoi j'ai pris le risque, par envie de satisfaire mon appétit subtil en faisant confiance à la foule qui me désignait une fraîche gâterie au milieu de ce monticule de mélasse qu'est mon genre de prédilection.
Pourquoi me suis-je senti floué?
On m'a vendu cette œuvre pour son ambiance travaillée et sans jump-scares aisés (j'ai lu ça dans les trois quarts des compte-rendus que j'ai déniché). Or c'est faux. On dénombre bien une demi douzaine d'exemples de ce cliché abhorré au fil de la projection. C'est gratuit, c'est aussi savoureux qu'un ahuri qui vient nous faire " bouh! " au visage alors que l'on recherche de la grâce macabre. Rares sont les films qui échappent à ce traitement, et Oculus est un usurpateur, car il tombe dedans parfaitement.
Par contre, quand les tensions sont travaillées, les aboutissements tiennent lieu d'avortements.
C'est à dire que l'apothéose est soit ridicule (la pomme-ampoule et re-pomme derrière), soit trop mal jouée (le balancier), soit ils ont oublié de prendre le temps d'attacher affectivement le public à la victime (twist : le mec sans signe distinctif qu'on a vu quatre secondes une demi-heure plus tôt revient dans le but de décéder).
Le scénario instaure des règles qui semblent ésotériques et complexes qui sous-entendent des jeux de l'esprit, voire des paradoxes délicieux, cependant elles peuvent se résumer à ça : le miroir fait ce qu'il veut, comme ça l'arrange. Donc les protagonistes n'ont pas de point de fuite tangible, donc pas d'espoir logique de dénouer la situation, donc perte d’intérêt.
La photographie, la musique et le pitch sont plutôt génériques aussi. Ce qui relève un peu l'arôme de la sauce c'est l'espèce de " croisement des ellipses " entre passé et présent. Pas mal, on évite de justesse l'insipidité létale.
Sinon on aurait juste eu droit à une énième histoire d'élément surnaturel introduit dans l'intimité d'un foyer pour le corrompre. (Avec en bonus une OST qui fait parfois très vaguement penser à une cover de " One of these days " de Pink Floyd reprise par un dépressif trépané sous Tranxen, et une image de téléfilm du début des années 2000.)
Bon...
J’exagère, je tape bas.
C'est une bonne chose que la photographie soit mise en retrait si on n'a pas pour principe de - ou le moyen et les idées pour - l'exploiter. La musique est plate et prémâchée mais elle fait son boulot (minimum syndical). Les acteurs sont corrects (surtout les gosses) et on a même droit à une tête connue (Karen Gillian, que j'aime bien pour son " capital sympathie ", mais qui n'a jamais été bonne actrice selon mon humble avis). Qui plus est, il n'existe pas véritablement dans l'imaginaire commun des synopsis originaux et transcendants, seules les variations comptent, et ce long-métrage parvient à tirer son épingle du jeu grâce au " croisement des ellipses" que j'évoquais plus haut.
C'est sans doute ce dernier élément qui a fait monter le soufflé dans des proportions abusives, ce qui m'a valu d'entretenir de hautes expectations de gourmet, et de râler amèrement quand on m'a servi un plat qui en comparaison semblait bâclé et réchauffé.
Je comprends que ce film ait pu plaire dans un certain contexte, mais servi en grande pompe avec toute l'argenterie on se sent spolié et l'influence s'avère négative. On reste sur sa faim.