Si Oculus parvient à être effrayant, c'est avant tout grâce à la reconstitution saisissante d'un drame familial particulièrement sordide. Petit à petit, le film dévoile le traumatisme bouleversant des deux personnages principaux, totalement impuissants à guérir d'une enfance pulvérisée. Quel qu'en soit le final, les deux gamins devenus adultes sont foutus, peu importe si le miroir est hanté ou pas. Le passé est le véritable ennemi, un croque-mitaine sadique qui harcèle le présent via une mise en scène extrêmement inspirée. Le spectateur sceptique se surprend à constater que le film ne sombre dans aucun des pièges habituels de ce type de production. Oculus est à la fois limpide dans ce qu'il raconte, grâce à un montage de virtuose, et complexe dans ce qu'il signifie, car évidemment il y a plusieurs interprétations possibles. Ni prétentieux, ni complaisant, Oculus parvient avec une facilité déconcertante à jouer les funambules entre réalité et paranormal. Impossible d'affirmer avec aplomb s'il s'agit d'une histoire de fantômes ou d'un délire schizophrénique des protagonistes. Au final, c'est un véritable cauchemar psychiatrique auquel on assiste, une tentative désespérée d'échapper à une réalité morbide grâce au fantastique. L'âme humaine ne saurait atteindre une telle noirceur sans l'aide d'une force machiavélique et inexplicable. Il est plus rassurant de croire en l'existence de monstres invisibles et manipulateurs qu'en la nature malsaine de l'être humain.