Poison Girl
Bon allez, pas d’introduction bien tournée pour cette fois, pour éviter toute confusion et parce qu’on colle des procès d’intention au film pas tout à fait pertinents, je vais commencer par quelques...
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le 8 juin 2016
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45
Il ne faut répondre qu’à une seule question : Ce film a de jolis décors, des acteurs convaincants, une réalisation parfois magnifique et pourtant il est médiocre. Pourquoi ?
Dans La Belle et la Bête (1946) Jean Cocteau nous demande humblement de retrouver notre âme d'enfant en introduisant son film par ces quatre mots magiques "Il était une fois". Dès cet instant mon incrédulité est totalement suspendue, dans des personnages volontairement caricaturaux, de la magie volontairement inexplicable et des Deus ex machina volontairement grossiers, je peux désormais voir les symboles et les métaphores qu’en réalité chacun d’entre eux portent. C’est le sens des contes et c'est une forme de vérité pure. [a contrario de tous les petits cons qui se croient malins à rationaliser un conte à vocation métaphorique : Euhhh IRL un mec moche reste moche quand une meuf le regarde ; Mais pourquoi les aigles volants n’emmènent pas Frodon directement au gros volcan ??? Tolkien leur avait déjà répondu quand leurs parents avaient même pas encore eu la sale idée de les engendrer.]
Or
Ici, The Neon Demon s'inspire clairement du conte :
• La princesse dans un motel pourri, mais qui finit par se retrouver (littéralement) dans un château.
• Ruby, Gigi et Sarah, durant les scènes finales d’orgies sanglantes, renvoient aux succubes/harpies/sirènes et à toute cette mythologie de monstres à visage féminin mangeurs d’hommes.
• Enfin, comment ne pas penser à la reine-sorcière, seconde plus belle femme du royaume, qui tue Blanche-Neige, la plus belle de toutes, pour lui ravir sa place.
Et évidemment tout conte qui se respecte dispose d’une morale et celle de notre film de deux heures tient sur deux lignes : Le mannequinat est un environnement toxique et affreusement compétitif où vous êtes aimée (et haïe) pour ce que vous êtes et non ce que vous faites, ce qui crée donc des haines viscérales (d’où le meurtre final).
Un bémol de plus car tout l’accent est mis sur la compétitivité de ce milieu et pas sur une quelconque remise en cause du fonctionnement du mannequinat en lui-même (qu’attendre d’autre d’un film lui-même beau mais finalement vide ?)
D’ailleurs le film nous présente des archétypes de conte :
• Jesse est particulièrement blonde (Is this your real hair?) et particulièrement blanche (You just have such a beautiful skin), d’autant qu’elle est vierge : Noblesse et pureté, c’est une princesse de conte de fées.
• Dean est évidemment le gentil et touchant prince charmant.
• Ruby s’inscrit entièrement dans cette tradition de conte où le nom même est porteur de symbolique : le rubis (évoquant le feu et le sang) renvoie à son caractère et éclaire la dernière partie du film.
Bref, tout ceci serait ultra pertinent dans un format de conte où tout est métaphorique (La Belle s’appelle La Belle parce qu’elle est belle et La Bête s’appelle La Bête parce que c’est une bête) mais devient absolument risible dans une fiction qui se présente comme réaliste puisque ces dernières demandent des interactions cohérentes entre humains complexes et parfois incohérents (exemple parfait dans True Detective).
Or ce film est un conte qui ne s'assume pas et c’est là tout le problème.
Car The Neon Demon se présente pendant 1h30 comme une fiction réaliste avant de passer entièrement au registre métaphorique dans les 15 dernières minutes : il ne m’a offert ni la pureté du conte, ni l’intérêt de voir évoluer des personnages réalistes et complexes. Les personnages commencent par être caricaturaux donc sans intérêts (le prince et la princesse), puis finissent par être absolument incohérents (les 3 femmes tuant Jesse).
La dernière partie du film cristallise cet échec : The Neon Demon fait croire tout du long qu’il est une critique réaliste du mannequinat avant de finalement basculer (uniquement dans les 15 dernières minutes !!!) sur une allégorie grossière de la compétitivité exacerbée entre mannequins. C’était à introduire intelligemment cette scène finale (d’ailleurs réussie) que les 1h30 précédentes auraient dû servir, pas à se toucher à faire des jolis plans qui disent rien sur l’univers que le réal voulait créer !
Bref, j’ai jamais vu que Lynch parvenir à un mariage vraiment heureux entre le conte et la fiction réaliste (Twin Peaks et surtout Mulholland Drive), or n’est pas Lynch qui veut, la preuve.
Je veux pas descendre sous la moyenne pour un film qu’a un réal qui sait tenir une caméra mais le cinéma n'aime ni les bâtards ni les réals qui sont bons qu’à filmer, donc comme l’a parfaitement dit mon maître à penser sans qui cette critique ne pourrait pas exister :
« Nicolas Winding Refn nous offre comme d’habitude un film visuellement merveilleux mais qui empeste aussi son égocentrisme. »
Créée
le 16 mai 2024
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