Poison Girl
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le 8 juin 2016
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Nicolas Winding Refn aura eu droit le temps de deux films aux réactions opposées du public. La consécration et les louanges des critiques et du public en 2011 avec Drive, puis le rejet total et les critiques virulentes pour Only God Forgives en 2013. Puis vint 2016 et The Neon Demon, film sur le milieu de la mode. Encore une fois, Cannes est là pour se charger du film, et les avis sont encore plus sévères. Le film se fait littéralement démonter, huer et j’en passe. Et pour ceux qui ne le savent pas, j’aime beaucoup le cinéma de Refn. Un réalisateur qui a un style qui n’appartient qu’à lui, et qui depuis 2009, s’est lancé dans une sorte de trilogie (ou quadrilogie) avec des personnages quasi mutiques. Valhalla Rising, Drive, Only God Forgives et maintenant The Neon Demon. Mais ce film marque surtout sa troisième collaboration avec le compositeur Cliff Martinez, qui compte pour beaucoup dans la création de cet univers (et qui livre une bande son tout simplement époustouflante dés les premières notes), et son deuxième film se déroulant dans un univers très coloré, limite psychédélique. Car soyons clair, ceux qui n’ont pas aimés Only God Forgives pour des raisons X ou Y vont rejeter The Neon Demon en bloc. Tout y est poussé à l’extrême.
The Neon Demon, c’est Only God Forgives par de très nombreux aspects, mais en féminin, en plus abstrait, et en plus radical. Certains dirons en plus chiant et en plus artsy. Car ici, les plans sont longs, les couleurs vives, l’ambiance y est pour tout, le scénario est mince encore une fois, et si l’on rentre dans cet univers, ça ne dérange pas. Malgré tout, The Neon Demon, contrairement au très court Only God Forgives (qui durait, sans le générique, 1h22), dure 2h quasi. On a parfois l’impression de se retrouver devant Mulholland Drive s’il avait été écrit et réalisé par Refn. Si le sujet n’est pas le milieu du cinéma, il s’agît ici du milieu de la mode. L’ascension et la chute de Jesse, une jeune fille débarquant à Los Angeles pour devenir célèbre grâce à sa beauté. Dès les premières images, où l’on découvre Jesse, allongée sur un canapé, ensanglantée, sur les notes synthé de Cliff Martinez, le lent zoom hypnotisant de Refn, les couleurs, on est dans le bain. The Neon Demon est une expérience. Et comme souvent, le film ne va pas surprendre par le traitement scénaristique de son sujet, banal en soit, mais par la manière visuelle et abstraite de le mettre en image. Encore une fois, le travail visuel est à tomber par terre. La photographie de Natasha Braier et la direction artistique de Eliott Hostetter sont tout simplement impressionnantes.
Les plans, les décors, les couleurs, tout comme la mise en scène de Refn, tout semble préparé au millimètre près et c’est un pur plaisir pour les yeux. Un très bon point dont personne ne doutait de toute façon. Qu’en est-il du reste ? Premier point, le casting. Les habitués du cinéma de Refn, que ce soit Mads Mikkelsen ou Ryan Gosling, ne sont pas présents. The Neon Demon est un film avant tout féminin, et le casting met en avant la jeune Elle Fanning. Découverte par beaucoup avec Super 8, elle crève ici littéralement l’écran, toujours juste, que ce soit durant toute la première partie où elle découvre le milieu ou par la suite, quand elle prend parfaitement conscience de ces atouts et de la jalousie des autres. Le reste du casting n’est pas en reste, puisque l’on trouve à ces côtés Jena Malone (Donnie Darko, Les Ruines, Sucker Punch), excellente, ou encore Abbey Lee (Mad Max Fury Road) et Bella Heathcote (Dark Shadows). Mais c’est bien Elle Fanning qui retient toute notre attention. Les hommes sont très en arrière plan, mais l’on retiendra la participation de Desmond Harrington (Dexter) en photographe peu bavard et un peu extrême et de Keanu Reeves en gérant de motel un brin pervers et dérangeant, et d’ailleurs plutôt excellent. Excellent casting, visuel à tomber, score musical parfait, scénario comme souvent mince, The Neon Demon est donc un pur film de Nicolas Winding Refn. Mais contrairement à ses habitudes, un élément nouveau dans son œuvre débarque, à savoir l’humour.
Oui, dans les différents échanges entre les personnages, notamment dans sa critique du milieu de la mode, The Neon Demon contient pas mal d’humour, et lors de la projection hier soir, beaucoup de gens riaient. Oui, les répliques étaient extrêmement bien trouvées, et les acteurs toujours dans le bon ton pour faire passer tel ou tel élément. C’est avec le recul seulement que l’on s’interroge sur cet humour. Car oui, cet humour, en fait, ne fait que contrebalancer la gravité des situations, voir la stupidité des situations. L’humour contrebalance le côté glauque et absurde du milieu, ce qui est bien vu. Nous rigolons de situations finalement qui ne prêtent pas du tout à sourire. Mais après nous avoir fait rire, The Neon Demon nous livre également 20 minutes finales extrêmement glauques dont je ne révélerais rien ! Refn s’amuse aussi à multiplier les hommages au cinéma de genre : La Féline de Paul Schrader, Les Griffes de la Nuit de Wes Craven, en passant par le giallo italien avec notamment Mario Bava et Dario Argento ! Donc The Neon Demon m’a totalement conquis ? Dans le fond, oui, j’y ai trouvé exactement ce que je voulais y trouver. Pour autant, le film n’est pas exempt de défauts. Durant quasi 2h, le métrage est pour une fois un poil trop long (de mémoire, Refn n’avait jamais fait aussi long). 10 minutes de moins n’aurait pas été bien grave. Dans le même ordre d’idée, le basculement pour Jesse entre son innocence et sa prise de conscience (donc, le pouvoir qu’elle a, sa beauté, la jalousie des autres) est un brin trop rapide, même si la scène en question est purement géniale et marquante. Quelques petits défauts, mais rien qui ne m’aura réellement gâché le plaisir de la projection, dans une salle où, pour une fois, personne ne s’est barré en pleine séance ! Finir la projection avec le palmarès du festival, c'était bien aussi, et sans surprises, The Neon Demon n'a aucun prix !
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Créée
le 23 mai 2016
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