Poison Girl
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The Neon Demon : est-ce un thriller, est-ce une blague ? La question et le doute résonnent face aux dialogues aussi vides que le regard des modèles ou professionnels du monde de la mode qui composent le film et entourent l’héroïne. Le scepticisme s’instaure tandis que celle-ci lave son faux sang. Après une image de crime déguisant un shooting elle se trouve embarquée dans une fête en club à l’ambiance étonnement sévère pour une soirée. Après le scepticisme, le ton est donné.
Du vrai sang coulera pourtant, lors de l’ascension de cette jeune fille de 16 ans sur les devants des fashion shows. C’est une personne spéciale : elle ébloui exagérément chaque personne de sa beauté toute fraîche et d’une sorte de charme lumineux. A tel point qu’à sa simple vue naissent aussi bien l’amour, que les larmes, la jalousie, ou encore un désir sexuel bien intense… Interprétée par Elle Fanning, nous la voyons fragile, presque apeurée, comme une « biche » lui dit-on. Elle gravi pourtant peu à peu les premières marches d’une reconnaissance dans cet univers effronté et blasé de la mode. Cette ascension a, presque évidemment, lieu à Los Angeles, où elle vient de débarquer, orpheline sans visible passé.
Les échelons montés lui donnent peu à peu une certaine confiance en elle, comme le prouve son premier défilé, dont elle reviendra le corps moulé de cuir et dotée d’une maîtrise nouvelle des positions suggestives. Loin de prendre le pas de ses cruelles collègues, elle ne se veut pas plus belle qu’elle ne l’est déjà, mais prend au contraire conscience de la force qu’elle puise dans ses charmes tous naturels, dans une sorte d’aura qui fera de même, sa faiblesse. Cette particularité lui vient du fait que la nature n’existe plus ici, dans ce monde sans pitié, qui peut jeter du jour au lendemain, du haut des marches au bas de l’échelle ou des strass à la terre, la moindre « biche » égarée. Cet univers cinglant transforme les femmes en véritables vampires, qui n’ont plus qu’un seul et unique but : la beauté. Cet effort pour une certaine vision de la perfection s’affaisse dans une ultime sophistication, allant jusque dans la déshumanisation : en attestent les yeux tellement froids des mannequins qu’ils en paraissent de verre, leurs actions de chirurgie esthétique incessantes, un maquillage pour effacer les moindres imperfections, les signes encore imperceptibles de l’âge, la lassitude, une simple ombre. Or, à force d’être triturés, redessinés, effacés, les traits sont devenus immobiles. Cette permanente recherche de beauté a en effet entravé ce qui fait l’âme de celle-ci : l’humain, la nature. Et c’est justement ce que porte très bien Jesse, notre douce et sensible héroïne, comme un antagonisme de ce monde qu’elle gravi trop vite.
Cette essence naturelle, cette pureté, c’est ce que tout le monde va tenter de lui prendre ; certains par le flash des appareils photos pendant des séances de shooting trop sensuelles pour être vraies ; d’autres encore par des appétits allant du désir sexuel à l’amour en passant par… le cannibalisme. La perte de l’humanité ouvre la porte aux transgressions. Il n’y a plus de limite pour ces néo-humains en quête d’une beauté unique, et prêt à violer, tuer, bouffer, littéralement. C’est comme si le « bien » avait disparu au profit d’un individualisme sans borne… Et qui fera le malheur de cette brave Jesse.
Cet égoïsme des personnages autorise en effet le réalisateur à nous plonger dans une suite de délires fantasmagoriques auxquels il prend visiblement beaucoup de plaisir. Et c’est précisément ce plaisir exalté surgissant de l’écran qui fait tout la force de ce film au synopsis pourtant très simple – une montée des marches se transformant rapidement en descente aux enfers, le fond du fond sans passer par le grand plongeon (quoi que). Le tout au sein d’une esthétique démesurément léchée et aux sons des synthés aux consonances très eighties auxquels Nicolas Winding Refn nous avait déjà habitué (Drive, 2011).
Il sera facile de passer à côté de The Neon Demon ; mais ceux qui saurons s’accommoder des strass aveuglants et accepteront de laisser la place du soleil au profit des néons, pourront s’embarquer avec plaisir dans ces suites de scènes perverses à la photographie parfaite et au kitsch déluré.
Créée
le 12 juil. 2016
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