Epoustouflant malgré ses imperfections

The Northman est un film d’aventure américano-britannique, co-écrit et réalisé par Robert Eggers. Ce dernier signe avec The Northman son troisième long-métrage, après les intrigants The Witch (2015) et The Lighthouse (2019). Robert Eggers, âgé de seulement 38 ans, est considéré par beaucoup (moi y-compris) comme un réalisateur visionnaire et extrêmement prometteur. Il affectionne particulièrement les long-métrages à l’atmosphère pesante et lugubre, et pourrait devenir, s’il ne l’est pas déjà, maître du film noir.


Passons au casting impressionnant de The Northman. On retrouve en tête d’affiche Alexander Skarsgård, plutôt méconnu du grand public, et ayant joué dans les films Battleship (2012) et Tarzan (2016), mais aussi dans les séries True Blood et Big Little Lies. Derrière lui, les stars s’accumulent, avec Nicole Kidman (Eyes Wide Shut (1999), Moulin Rouge (2001), The Hours (2002)), Willem Dafoe (Platoon (1986), The Grand Budapest Hotel (2014)), Ethan Hawke (Lord of War (2005), Sinister (2012)), et enfin Anya Taylor-Joy (The Witch (2015), Le Jeu de la dame, Peaky Blinders).


Nous sommes au Xème siècle, chez les vikings. Amleth vient tout juste de devenir un homme lorsque son père est assassiné par son propre frère. Celui-ci s’empare du royaume et capture la mère du jeune homme. Amleth fuit son royaume à la barque, jurant de venger son père, de sauver sa mère, et de tuer son oncle. Deux décennies plus tard, Amleth est rattrapé par son destin.


J’attendais ce film avec impatience pour plusieurs raisons, en tête desquelles mon affection particulière pour Robert Eggers, réalisateur, chef d’œuvre incompris d’après moi. Les images de la bande-annonce laissaient présager un film noir, très violent, mais aussi très puissant visuellement. Malgré mes attentes fortes, The Northman ne m’a pas déçu, au contraire, et me conduit à ne pas comprendre le retour critique assez dur sur ce film.


The Northman est un film qui ne peut qu’interpeller, qui se différencie, de par sa réalisation unique, ses idées scénaristiques parfois brillantes mélangeant fantastique et réalisme, et sa photographie phénoménale. Visuellement, The Northman ne laisse pas indifférent, tant ses plans uniques, souvent symétriques, révèlent la patte unique de Robert Eggers. Ce réalisateur a la capacité de filmer les personnages avec une pertinence et une justesse qui s’adaptent en fonction de l’évolution du film. Robert Eggers, par son jeu de caméra et ses effets spéciaux bien calculés, sait rendre un personnage tantôt terrifiant, tantôt majestueux, tantôt misérable. La force des personnages ne résulte dans The Northman pas seulement du jeu certes irréprochable des acteurs, mais aussi et surtout des jeux de caméra, de lumière, d’effets spéciaux, qui jouent un rôle colossal dans le film, s’adaptant au rythme de l’aventure d’Amleth, évoluant et se réinventant constamment. La bande-son fantastique du film s’allie d’ailleurs merveilleusement avec les images, amplifiant leur puissance et leur capacité à emporter le spectateur avec elles. The Northman tire son gros point fort de sa beauté, de sa puissance visuelle, qui à elles seules en font un film à part, un film unique et marquant. Eggers n’a pas déçu de ce point de vue-là, et s’est accaparé l’univers des vikings brillamment.


C’est sur les autres aspects du film que mon avis est plus partagé, en particulier au niveau scénaristique. Globalement, je le trouve bon, il est plein de rebondissements, pas particulièrement prévisible, et franchement prenant. Le problème réside en fait dans l’omniprésence de la question de la destinée dans The Northman. Robert Eggers a fait le choix assez incroyable de mélanger dans son film un réalisme brut, avec une dose de fantastique liée à la mythologie viking, au point qu’il était parfois difficile de savoir à quelle catégorie ce film appartenait. Est-ce que les scènes de fantastique faisaient vraiment partie de l’histoire, ou est ce qu’elles ne constituaient qu’un hommage du réalisateur aux croyances nordiques de l’époque, un hommage à un imaginaire ? Jusque-là, rien de négatif me diriez-vous. Pour en revenir à la destinée, on sait assez vite ce qui attend Amleth dans son aventure, et on attend simplement que la prophétie se réalise. Conséquence : cela entraîne certains moments du film à trainer légèrement en longueur, le spectateur adoptant une posture « attentiste ». En écrivant ces lignes, je me rends compte que cette critique est un peu dure, mais en salle c’est quelque chose que j’ai ressenti. Peut-être qu’un dévoilement plus énigmatique, mystérieux, du destin d’Amleth aurait été plus judicieux.


Autre problème : la difficulté du spectateur à s’attacher au personnage principal. Celui-ci a très peu d’émotions, et s’avère parfois aussi simplet qu’extrêmement violent. Pendant le film, si ce n’est au début, j’ai ressenti très peu d’empathie pour Amleth. Par contre, on ressent avec lui sa détermination et son profond désir de vengeance, c’est déjà ça. C’est lorsque l’amour entre dans sa vie que le spectateur peut commencer à s’attacher à quelque chose, à s’identifier, et à être plus impliqué émotionnellement dans The Northman.


Pour finir sur une note positive, je rendrai hommage à certaines tirades du film, à l’image d’incantations chamaniques, absolument époustouflantes. A de multiples reprises, le spectateur se retrouve cloué à son siège, hypnotisé par la puissance des mots proférés, combinée à la beauté et à l’ambiance lugubre des scènes. Sublime.


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le 29 août 2022

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