Vertigineux. The Outwaters amène une puissance insoupçonnée au found footage horrifique et bien + encore.
Inspiré (par Blair Witch Project, mais on peut citer Terrence Malick, Carlos Reygadas, Alien, Noé, Kubrick...) le jeune réalisateur américain Robbie Banfitch s'approprie la matière filmique de ses ainés avec une ingéniosité singulière dans le cinéma de genre.
Foisonnant d'idées maitrisées, la plus évidente est certainement le dispositif au coeur de sa mise en scène: un oeilleton qui ne laisse voir que les bribes d'un calvaire sanguinolent et plus subtil qu'il n'y parait malgré sa férocité.
La seconde idée, la plus grande et étourdissante: le son, rôle majeur tout au long du film. Si la longue 1ère heure, semble douce et légère, elle est dès le départ nourrie d'interférences et de distorsions sonores (voix distordues de l'enregistrement 911, chant de Michelle altéré par l'autotune, tremblements de terre, glitches pendant la baignade de Robbie) mais aussi d’hallucinations visuelles (dès son entrée dans le désert, Robbie filme au loin une itération du futur qu’il va endurer) au service du récit qui se joue d'apparences très simplistes mais s'articule autour de contre-champs auditifs et visuels constants. Ces jeux d'illusions et d'indices sont brillants, encore plus après un second visionnage, et permettent de saisir l'intelligence du réalisateur à garder une approche distante de la psychologie de ses personnages; que certains semblent regretter.
En effet, dans The Outwaters il n'est pas question d'un groupe de jeunes en vadrouille dans le désert sombrant 1h durant dans un cauchemar psychédélique mais plutôt du naufrage mental, ésotérique et mystique (dont les symboles me manquent pas, notamment le troupeau d’ânes, entités protectrices du paradis) de son protagoniste principal, face à une terreur cosmique impalpable. Entre tragédie grecque et crise existentielle, le final constitue une apocalypse lovecraftienne dans ce qu'elle représente de l'annihilation de toute humanité (d'abord l'émasculation = l'homme, puis l'éviscération = destruction du siège des émotions et de la création = la femme)
The Outwaters est incontestablement une expérience sensorielle expérimentale aussi passionnante que réflexive, sans jamais être pompeuse. L’efficacité du genre reste de mise. Film totalement ovni, clairement sous-estimable, culte en devenir, foncièrement renversant à condition de se laisser emporter par les images et la precision de sa bande son.