Le facteur exotique semble avoir égaré nombre de spectateurs fiers d’avoir visionné un film thaïlandais – preuve d’une ouverture d’esprit, d’une cinéphilie sans frontières, d’un sens du bis ou du Z. Il n’en demeure pas moins qu’en dépit de la petite notoriété dont il jouit aujourd’hui, Hô Boi Tu Thân est une production médiocre qui ne sait comment faire tenir son concept sur une heure et demie : flashbacks à répétition, prolepse initiale, multiplication des retournements de situation tous plus invraisemblables les uns que les autres.
Alors nous rions beaucoup, au détriment du long métrage qui échoue à nous donner à vivre l’essentiel, à savoir le calvaire d’une attente peut-être vaine : le réalisateur se voit obligé de chapitrer son récit par jour passé, incapable de faire durer ses plans, de rallonger ses scènes, de construire des séquences inscrites dans une durée longue ; il n’a confiance ni dans ses acteurs – à juste titre, ils ne sont pas très bons – ni dans la puissance d’une atmosphère anxiogène et mortifère au sein de laquelle le crocodile n’est qu’une menace supplémentaire, l’incarnation physique du danger invisible de la détention des personnages dans un espace fermé.
À vouloir à tout prix chasser l’ennui, à relancer constamment son intrigue par divers twists grotesques, il tue dans l’œuf son dispositif qui exigeait, au contraire, de prendre le temps, de le représenter, de l’intégrer comme ennemi principal. La mise en scène oscille entre la franche laideur et l’image saisie sur le vif, caméra à l’épaule ; les effets numériques s’avèrent inégaux, même si la créature convainc davantage que les suites infligées au film Lake Placid (Steve Miner, 1999). C’est dire.