Le film est à l’image de la place de la religion en Corée : chacun est libre de choisir en quoi/qui croire. Cette capacité à aborder différents sujets fait du cinéma coréen un 7ème art aux multiples facettes, ce qui permet de renouveler les genres. The Priests garde donc les codes du film d’exorcisme tout en ajoutant sa propre couleur grâce à des spécificités culturelles coréennes. Ainsi, croyances chrétiennes et chamanisme coréen se côtoient - toute aide est bienvenue pour venir à bout du Diable. L’histoire reste somme toute classique, avec l’utilisation du schéma « le vieux qui a de l’expérience enseigne au jeune premier. »
Ce qui n’empêche pas le film d’être plaisant par sa photographie et ses plans soignés (quelques belles vues aériennes, merci les drones), ses scènes « violentes » qui ne tombent pas dans le mauvais goût (des scènes impressionnantes mais pas de voyeurisme au niveau des blessures) et la fameuse touche d’humour (je ne verrai plus jamais le dentifrice du même oeil ; voir aussi le passage avec le cochon dans le restaurant). Film plaisant, disais-je, mais également prenant. Certaines scènes comportent une ambiance tendue et pesante bien qu’il ne se passe « rien ». Cela tient à de bons jumps scares savamment distillés et au casting, que ce soit le tandem Kim Yun-Seok/Kang Dong-Won ou que ce soit la possédée Park So-Dam.
Cette dernière devient méconnaissable, tant par le maquillage que par ses expressions. Fait intéressant, l’actrice n’a jamais vu le film « The Exorcist » (le classique datant de 1973, réalisé par William Friedkin) car elle a peur des films d’horreur ; elle s’est servie des techniques de vocalisation et de respiration apprises lors de ses cours de théâtre (source). J’ai eu peine à croire que c’était la même actrice que dans le drama médical « Beautiful Mind » (avec Jang Hyuk, je le recommande d’ailleurs !).
Enfin, The Priests n’est pas exempt de défauts puisqu’au début du film, l’intrigue semble complexe, on parle de Rose-Croix, de 12 fausses idoles et par la suite, pouf, plus rien. Les termes techniques sont moins utilisés. C’était vraisemblablement un prétexte scénaristique pour expliquer ceci et cela (je ne veux pas spoiler !) mais bon c’était pas la peine de se la péter comme ça si c’est pour aboutir à une banale histoire d’exorcisme (où est passé mon complot ? Haha). Autre bémol, une fin mi-figue mi-raisin (dur de pas spoiler), j’aurai préféré que le réalisateur ne mette pas de l’eau dans son vin (de messe, hihihi).
Bonus :
- Le réalisateur Jang Jae-Hyun résume en une phrase comment l’idée du film lui est venue (à la base, un court-métrage) : "I got a weird feeling when I saw a priest waiting anxiously for someone on the other side of a fast food restaurant window. The Priests started then."
- Mention spéciale au compositeur Kim Tae-Seong dont la bande-son est envoûtante.
- La séquence « Victimae Paschali Laudes » se joue normalement lors du dimanche de Pâques.
Traduction des paroles disponibles ici. Merci à @sawatdie de m'avoir mentionné le lien mort, je l'ai changé et j'ajoute la version qu'elle a trouvée ici !
Compléments de notions vues dans le film :
- « La Rose-Croix est un ordre hermétiste chrétien » (Wikipédia). Pas clair, hein ? Concrètement « hermétiste » renvoie à un courant de pensée inspiré par le personnage mythique d’Hermés Trismégiste dont les écrits « Hermetica » ont inspiré un tas de monde à travers les siècles. Il est question aussi d’alchimie. En gros, l’Ordre de la Rose-Croix (il en existe plusieurs à travers le monde), se veut comme un ordre rassemblant les gens voulant effectuer un rite spirituel initiatique, soit découvrir les mystères de la Nature (coucou le mysticisme). ça peut paraître surprenant mais ça n’est pas obligatoirement lié à la religion ! Suffit de voir leur Instagram - ouais ils sont modernes ! Dans la description de leur compte Insta ils parlent de lois métaphysiques. Pour l’anecdote, sur leur site mondial il n’y a pas de lien vers une page coréenne.
- J’ai cherché l’histoire des 12 fausses idoles mais je n’ai rien trouvé, ça doit être une invention du réalisateur. Pareil pour le nom du démon.
- Il existe deux sortes d’exorcisme dans le rituel romain : le simple et le grand. En général dans les films, c’est souvent le grand, le « solennel » qu’on voit à l’oeuvre (c’est plus photogénique lol). Cela dit, on peut voir les 2 types dans le film « The Rite » de Mikael Håfström.
- Plus de détails sur les exorcismes pour les curieux, ici (en anglais).
- Symbolique du cochon au Moyen-Âge et n’oublions pas la célèbre histoire des démons expulsés via un troupeau de pourceaux.
P.S : Je sais, j'utilise beaucoup Wikipédia pour mes recherches, alors il y a peut-être des fautes, mais je compare systématiquement les versions française et anglaise pour compléter mes infos !
P.S bis : Tant qu'à choisir des "prêtres" je préfère ceux-là.