En 1972, l'égérie de la Toei Junko Fuji (Lady Yakuza, Nippon kyōkaku-den) se marie et prend sa retraite (elle aura même le droit à un film-jubilée, Junko se retire), obligeant Shigeru Okada à lancer un grand casting pour trouver celle qui lui succèdera et incarnera le nouveau visage du studio. The Red Silk Gambler est l'un des tous premiers films de cet après et l'occasion pour Teruo Ishii de mettre en avant plusieurs actrices dont certaines toutes nouvelles dans le circuit. Eiko Nakamura, dans le rôle principal, pressentie pour remplacer Junko avec laquelle elle partage une ressemblance palpable, une actrice au destin digne d'un film puisqu'elle épouse dans la vraie vie le fils d'un célèbre boss yakuza et décèdera à seulement 24 ans. Reiko Ike, découverte un an plus tôt par Norifumi Suzuki, une actrice au large buste qui n'a pas froid aux yeux, Sanae Tsuchida, autre jeune étoile du studio, Junko Matsudaira, Hiroko Fuji. Là où généralement le ninkyo réserve un ou deux rôles pour les personnages féminins, ici les protagonistes, à l'exception de Bunta Sugawara, sont campés par des femmes. Les hommes sont très en retrait ou montrés comme des crapules tordues (le souteneur, les boss yakuzas) toujours enclins à créer des conflits et à exploiter les femmes. Au passage Ishii se réserve quelques scènes à classer tout droit dans le registre Toei Porno.

Sans aller jusqu'à parler de féminisme latent, l'intention de confier les beaux rôles à des femmes et de dénoncer une certaine exploitation semble sincère, on n'oublie pas qu'Ishii a fait ses armes dans le cinéma auprès de Naruse, Hiroshi Shimizu et Kinuyo Tanaka. D'ailleurs la réalisation est très soignée, et comme souvent avec ce réalisateur, fait la part belle à la technique, aux plans rapides, à la couleur et aux jeux de lumière. Quelle belle scène que ce passage avec les trois femmes sur une barque au crépuscule, ou le combat avec la sabreuse aveugle dans un huis clos éclairé à la lueur des bougies et des éclairs. Les scènes de sabre sont nerveuses, incisives et particulièrement sanglantes. A rapprocher d'un Zatoichi bien plus que d'un ninkyo classique. Un film qui joue donc sur plusieurs tableaux et fait très fort dans chaque domaine qu'il aborde.

[7,5/10]

Yushima
7
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le 1 nov. 2024

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