Sans doute inspiré par son aîné James qui lui avait confié l'un des rôles principaux de sa réalisation la plus couronnée de succès "The Disaster Artist", Dave Franco fait à son tour ses premiers pas derrière la caméra par l'intermédiaire d'un home invasion à l'approche certes singulière mais laissant un trop grand goût d'inachevé quant aux ambitions qu'il nous fait entrevoir.
Dans une Amérique matraquant l'idée d'un repli sur soi et d'une paranoïa de l'extérieur toujours plus grande, le succès du Airbnb -que l'on laisse sa maison à un étranger ou que l'on investisse la propriété d'un parfait inconnu le temps de quelques jours- fait figure de complet paradoxe. Quand on y pense, ce système incarne le principe même sur lequel repose la construction d'un bon home invasion : le propriétaire entrouvre en effet une partie fondamentale de son intimité à ses locataires pendant que ces derniers laissent libre cours à la leur sans fard au sein d'un lieu qui devrait lui rester extérieur, le tout en plus sur la base de quelques bonnes notes d'internautes dont on ignore l'origine.
Ici, cette plongée dans l'inconnu que les utilisateurs du Airbnb choisissent plus ou moins sciemment d'éluder va évidemment devenir l'angle d'attaque astucieux du film de Dave Franco et même carrément déteindre dans sa manière de le traiter dans son ensemble.
Après quelques altercations avec le logeur au sujet de préjugés nauséabonds qui instituent un climat de méfiance à son égard, "The Rental" va donc s'évertuer à nous présenter l'ambiguïté des rapports de son quatuor de personnages, cette intimité qu'ils livrent en pâture à autrui sans le savoir.
Dans cette logique, Franco adopte un ton lui aussi quasiment intimiste, venu tout droit du cinéma indépendant US où il a souvent œuvré en tant qu'acteur, pour nous les présenter. C'est bien simple, s'il n'y avait pas quelques perspectives angoissantes pour nous rappeler un danger imminent prêt à éclater (comme lorsque la caméra fait confondre le regard omniscient du spectateur avec celui, voyeur, d'un prédateur extérieur), "The Rental" aurait tout d'un petit film d'auteur dramatique nous racontant les vicissitudes d'un groupe d'amis réunis le temps d'un week-end. Le procédé est loin d'être idiot et a le mérite d'élaborer des personnages plus creusés qu'à l'accoutumée (la qualité de leurs interprètes y participe également) mais Dave Franco va hélas trop en abuser pour l'étendre sur près des deux tiers de son long-métrage et révéler par inadvertance les contours finalement très caricaturaux de ce genre de protagonistes sur la durée. Les faiblesses des relations contrariées de ce quatuor vont ainsi déboucher sur des dilemmes moraux plus qu'attendus, ceux-ci vont bien entendu avoir une utilité capitale lorsque la menace extérieure va s'en emparer (et c'est là le but recherché) mais leurs perspectives pas vraiment des plus passionnantes vont prendre le pas sur tout le reste et même étouffer la dernière partie du film se voulant plus dynamique.
Il faut dire que, lorsque la confrontation induite par le home invasion prendra enfin toute son ampleur, Dave Franco ne se dirigera pas vers les choix les plus originaux en la matière. Sans toutefois démériter niveau mise en scène, le couperet s'abattant sur les personnages se cantonnera à rester dans les canons très classiques du genre, sans chercher à en proposer plus, et ce même du côté de l'assaillant devenu lui aussi une caricature à l'instar de ses proies par le choix de Dave Franco de le laisser délibérément dans l'ombre comme n'importe quel boogeyman lambda et terriblement oubliable...
Tout de même bien plus enthousiasmant qu'un famélique "The Open House" (un home invasion qui lui aussi élargissait un concept immobilier, celui des journées portes ouvertes, à l'intimité de ses personnages devenus les proies d'un tueur anonyme) par le potentiel des partis pris de narration de Dave Franco et sa réalisation malgré tout intéressante, "The Rental" ne concrétise hélas que trop partiellement les belles ambitions que l'on y décèle. Il est fort à parier que Dave Franco fera bien mieux à l'avenir, les promesses sont là en tout cas.