The room est un film sur la non-communication. Nous remarquerons tout d’abord l’accent étrange du démiurge Tommy Wiseau. Aucune communication n’est possible. Le jeu d’acteurs totalement à la ramasse le montre bien. Les personnages ne font que répéter des schémas absurdes ou au contraire à casser nos schémas habituels. On remarquera la scène chez le marchand de fleur :
-Oh hi doggy !
-You’re my favorite customer
Etc.
où tout sonne faux comme si les phrases auraient dû arriver plus tôt ou plus tard. Comme s’il devait avoir un autre ton pour les dire. Les personnages ne se comprennent pas. Les conversations peuvent tout d’un coup passer du coq à l’âne «Anyway, how is your sex life » Ce problème de la non-communication renvoie bien entendu à Godard. The room est un hommage évident au Mépris.
Pourquoi la femme tout d’un coup se désintéresse de son mari ? On ne le sait pas mais tout d’un coup apparait une haine, disons-le un mépris. Pourquoi n’a-t-il pas sa promotion ? Quelles sont ces idées qui permettent d’économiser beaucoup d’argent ? Tout ça n’est pas explicité parce que ce n’est pas important Ce qui est important c’est la soudaine haine qui apparait et qui va tout détruire que ce soit dans le film (la fin avec le suicide) mais aussi le film lui-même. C’est cette haine qui dérègle le film, qui fait répéter, bégayer ces scènes de sexes qui sont totalement identiques en plus d’être clichées. Clichées parce que la réalité ne peut tout d’un coup plus apparaitre dans le film.
Tout doit se jouer dans cet appartement, dans cette room qui voit passer de nombreux personnages. Cette room, lieu total où se décident les destins ; Comme dans une pièce de théâtre classique, l’unité de lieu est presque totalement respectée. Les personnages secondaires semblent tellement improbables que ça ne peut être qu’une création de l’inconscient de l’un des 2 personnages principaux. Ce problème, cette haine métaphysique, totale nie tous les autres problèmes. Que la mère ait un cancer du sein n’est pas important, l’histoire ne prend tout simplement pas en compte tout cela car ce n’est pas le thème. Malgré toutes les distractions que le film tente de mettre pour cacher cette haine : un dealer mécontent, une partie de football américain en costard, tout découle finalement sur le conflit et la mort. Remarquons le caractère de Mark qui ne peut pas contrôler ses mouvements. Il est guidé par la destinée.
Le film est une tragédie mais il est aussi une comédie. On n’arrête pas de rire devant ce film devant le potentiel comique (notamment le potentiel de celui qui aurait pu être mannequin : Tommy Wiseau) et on est surpris par la fin. Le caractère nanardesque du film nous fait presque oublier le destin inexorable. The room c’est comme la vie qui oscille entre la comédie et la tragédie. Remarquons que la femme ne peut pas accepter la mort, elle se demande après que Wiseau se soit tiré une balle dans la bouche s’il est encore vivant.
Si dans le Mépris il y a un rapport au cinéma, dans The Room aussi avec ce constant aller retour qu’effectue le spectateur entre le film et la réalité. Le film dans le mépris est pour The Room, the Room lui-même (remarquons quand même que Fritz Lang est un piètre réalisateur face à la maestria déboussolant de Wiseau)
Tommy Wiseau en démiurge acteur, producteur, scénariste, réalisateur nous montre son œuvre totale dépassant son modèle : le Mépris. Mais il nous est surement supérieur vu les ciritiques infantiles qui sont faites au film. L’humanité ne semble pas avoir compris l’esprit général du film-monde qu’est The Room.