Je n'aime pas les biopics.
ça, c'est dit.
Bien entendu, ce type d'assertion nécessite une inévitable exception, en l’occurrence Laurence d'Arabie.
Mis à part le film de Lean, je déteste les biopics.
Mais je suis faible.
Il m'a suffit de voir les notes élogieuses obtenues par ce film, agrémentées de critiques dithyrambiques, pour me dire qu'il allait falloir que j'y passe.
Avec un petit doute cependant : pour raconter une vie, encore faudrait-il avoir une vie à raconter.
Faire le biopic d'un gamin de 20 berges dont la seule occupation est d'entrer des lignes de codes sur son ordi, et dont la seule action est d'avoir créé un site internet, ça relève du défi ou de la folie.
Et c'est un peu ce que j'avais espéré, de la folie.
Comme on pouvait s'y attendre, le film est plus un compte-rendu de la création de Facebook et des controverses qui l'entourent. C'est rempli de mots que je ne comprends pas, n'étant pas un nerd moi-même. Et puis, il y a un enjeu qui devrait être passionnant : savoir si Mark va se faire pécho pour avoir volé le concept à deux Ken avironneurs.
Mouais.
Perso, ça ne m'en a pas fait frémir une.
La construction, assez complexe, est établie sur une suite d'aller-retours entre les négociations judiciaires et les événements passés. Le tout se perd dans un flot ininterrompu de paroles, un tel tsunami vocal qu'il me paraît impossible de tout suivre (j'ai vu le film en VO et il y a pas mal de lignes de dialogues que je n'ai pas lues : débit trop rapide). Des dialogues parfois assez malins, mais souvent également du simple remplissage verbal dénué d'intérêt.
ça parle beaucoup pour ne pas dire grand chose, on est d'accord. M'enfin, il faut tenir deux heures sur la création d'un site internet, ça fait un peu léger, comme programme...
Alors, pour donner du rythme, Fincher fait un montage ultra-rapide de plans très courts. Une réalisation à la Oliver Stone. L'avantage, c'est qu'il n'y a pas de temps mort. L'inconvénient, c'est que c'est épuisant et complétement déconnecté du sujet. Fincher confond montage elliptique et épileptique.
Alors, finalement, qu'est-ce qui rachète le film ?
Son portrait de Mark Zuckerberg.
Dès la scène d'ouverture, on est confronté à un paradoxe dont on sent qu'il amuse Fincher. On nous parle de "réseau SOCIAL", c'est même le titre du film, et dès le dialogue d'ouverture on comprend que le personnage principal est tout, sauf social. Et ça se confirme dans tout le film : Zuckerberg est un asocial. Il n'est jamais dans les dialogues, par exemple : soit il n'écoute pas les autres, soit il répond complètement à côté de la plaque. Soit il s'amuse à provoquer. On sent le mec très intelligent mais inadapté social. Il ne parle qu'informatique, ne vit qu'informatique. Dès qu'il a une déception sociale (on se moque de lui, on lui refuse quelque chose), il se réfugie dans l'informatique.
Le personnage est très bien. Son interprète est remarquable. Le casting, en général, est irréprochable (oui, même Andrew Garfield, c'est dire !), mais Jesse Eisenberg frôle l'exceptionnel, tant par sa présence à l'écran que par son interprétation.
Fincher établit aussi un contraste entre Zuckerberg et Saverin, entre le fou de programmation et le riche étudiant. L'un dans ses délires informatiques, l'autre plus terre-à-terre. Ils se complètent pendant un moment avant de s'opposer finalement. Leur confrontation donne un peu de sel à ce film.
Parmi les qualités, je noterais aussi la bande originale.
Le résultat est pour moi plutôt contrasté. Un film où les qualités et les défauts s'équilibrent. et puis je ne peux pas dire trop de mal d'un film avec une actrice asiatique aussi mignonne...