Un hommage au cinéma dans ce qu'il a de plus noble

C’est un peu hésitante que j’ai pris la route si familière de l’UGC en ce dimanche tout gris en me disant que ce n’était pas raisonnable d’aller voir ˋThe Souvenir’ de Joanna High, un diptyque de 4h alors que je devais abattre une dure semaine de travail et commencer à travailler à 23h le soir-même jusqu’à 7h30 du matin et ce pour 5 nuits consécutives. 
En plus d’une potentielle fatigue à venir et de la durée, j’ai été un peu refroidie également par la lecture d’un bon nombre de critiques négatives, de spectateurs ayant quitté la salle d’ennui lors de la projection. Est-ce que cela m’a déjà arrêté auparavant ? 
Bien sûr que non, alors allons-y, embarquons pour ces quatre heures de film !


Le moins que l’on puisse dire c’est que je suis encore une fois reconnaissante d’avoir suivi mon intuition tant ce film m’a vraiment transporté et l’héroïne bouleversé. 
Dés la sortie de la salle, j’ai ressenti le besoin viscéral d’écrire dessus.

En première partie, nous suivons Julie dans les années 80, dans l’Angleterre des années Thatcher. Cette dernière y étudie le cinéma et veut d’abord filmer la ville écossaise de Sutherlands et ses chantiers navals, elle est encore trop naïve et trop fragile pour se raconter elle-même dans son oeuvre. 

Puis, lors d’une soirée elle fait la rencontre d’un homme plus âgé qu’elle. Il est charismatique et possède cette assurance qu’elle n’a pas. Notre héroïne tombe amoureuse du tableau «The Souvenir» de Fragonard dans un musée en même temps qu’elle tombe amoureuse d’Anthony. Julie s’oublie très rapidement, met de côté sa passion pour le cinéma pour se dévouer corps et âme presque exclusivement à cette passion amoureuse dévorante et toxique. 
Mais, cet homme mystérieux commence à lui demander de l’argent de plus en plus régulièrement et ses absences se répètent. Julie découvre alors que son amant se drogue et à la fin de la première partie, le pire se produit, laissant notre cinéaste en devenir complètement brisée et désemparée.


Dans la deuxième partie, notre retrouvons Julie tentant de se ressourcer chez ses parents après le drame, assistant de nouveau à ses cours de cinéma avec assiduité, se nourrissant beaucoup des autres : acteurs, réalisateurs, scénaristes, producteurs… , apprenant à composer avec la personnalité, les egos et les sensibilités de chacun, retrouvant peu à peu la passion initiale pour son métier, elle décide de transformer le traumatisme qu’elle a vécu en art.
Et c’est vraiment à partir de ce moment-là, de ce film dans le film, qu’à mon sens l’oeuvre devient jubilatoire.
Libérée du pouvoir qu’exerçait cet homme sur elle, quel bonheur de voir Julie s’épanouir, évoluer et s’affirmer davantage dans ses choix, finir par trouver son style en se jouant des codes, brouillant les pistes du réel et de la fiction. Ici, la vie imite l’art ou l’art imite la vie. 
Cette force créatrice est parfaitement rythmée par une bande son qui ravira tout autant les amateurs de New Wave que de Rock Indie et on apprécie particulièrement l’apparition de l’artiste Anna Calvi.

Honor Swinton-Byrne (Julie), véritable révélation crève l’écran de sensibilité et de magnétisme face à sa mère de chair et de fiction qui n’est autre que la comédienne Tilda Swinton.

Comportant une grosse part d’autobiographie, ce diptyque est avant tout une déclaration d’amour au cinéma de sa réalisatrice dans ce qu’il a de plus noble : savoir donner à voir au monde une sensibilité, une vision,le cinéma comme exutoire pour se reconstruire, celui qui sauve et qui soigne mais aussi son aspect technique. 
C’est en sachant apprécier tous ces aspects qu’on saura savourer pleinement cette oeuvre magnifique qui personnellement me marquera pour longtemps.

Créée

le 7 févr. 2022

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