"The square", l'oeuvre fictive qui donne son titre au film, est une installation d'art contemporain composée d'un néon posé au sol dont l'auteur nous dit qu'il délimite un "sanctuaire" où règnent l'amour, la justice, la tolérance, le partage... Toutes ces valeurs consensuelles, c'est exactement celles que l'on ne verra pas dans le film de Ruben Östlund. The square, le film, se sert en effet de The square, l'oeuvre d'art, pour développer en négatif, une satire du petit monde de l'art et de notre société dans son ensemble. Le directeur de musée qui est au coeur du film, représente à ce titre, le parfait mâle dominant de notre civilisation occidentale, lui qui vit au sommet à la fois des pyramides sociale et culturelle, sans pourtant produire grand chose. En faisant se télescoper dès le début du film, son quotidien de bourgeois de gauche avec celui de miséreux, le scénario ouvre une brêche sociologique entre 2 mondes aux antipodes, brêche qui servira de fil conducteur pour l'histoire, et dans laquelle tous les personnages - artistes, critiques, publicitaires, assistants, mécènes - s'engouffreront pour ajouter leur petite partition égoïste et absurde. Cette forme de surréalisme sociologique où le spectateur perd le sens des réalités et des valeurs, c'est l'originalité de cette fable morale, par ailleurs souvent drôle, qui traite tous ses personnages à égalité et qui va jusqu'à nous faire douter de notre propre rôle de spectateur-consommateur au sein de ce dispositif.