Nos amis australiens sont en forme actuellement : après nous avoir battus fin novembre 13 à 18 (oui, je parle bien de rugby), c'était au tour du trio Luhrmann / Kidman / Jackman de venir fin décembre porter haut les couleurs du pays des wallibies dans nos grises contrées. Et voilà que débarque dans nos salles cette semaine un magnifique film noir portant le nom de The Square, tout premier long-métrage du jeune Nash Edgerton, et porté par une "gueule" du cinéma australien, David Roberts.
Un nom qui vous est peut-être inconnu et pourtant Roberts a été vu ces dernières années dans bon nombre de productions hollywoodiennes, de Matrix Revolutions (2003) à L'Amour de l'or (2008) en passant par Ghost Rider (2007). Cette fois, il tient le premier rôle. Il est celui dont la maîtresse (Claire Van Der Boom) découvre dans le plafond de sa maison un sac rempli d'oseille, du fric appartenant à son bad boy de mari (Anthony Hayes) qui n'a rien d'un enfant de coeur. Une idée lui trotte alors dans la tête : s'enfuir avec son amant et le pognon et laisser tout derrière eux. Raymond se laisse tenter. C'est qu'il l'aime, sa Carla. Un plan s'échafaude alors malgré certaines réticences mais tout ne se passera pas comme prévu, et c'est dans un abîme ténébreux que le couple illégitime s'aventurera. Quelqu'en soit le prix.
Un scénario peu original ressemblant à peu de choses près à celui de True Romance (1993). Pourtant les deux films n'ont pas grand chose à voir l'un avec l'autre. Le film de Tony Scott avait clairement la QT's touch, avec un portrait cool et déjanté des deux protagonistes en cavale, tandis que The Square instaure d''emblée une ambiance plus sombre, plus dramatique, plus crépusculaire. Chaque instant du long métrage est un moment où l'on sent les flammes de l'enfer s'attiser de plus en plus au fur et à mesure que Carla et Raymond s'y aventurent.
Pour un premier film, on ne peut que saluer le degré de maîtrise du cinéaste sur son objet filmique. Le manque d'originalité est très vite balayé par une dramaturgie prenante et surprenante, aidée par des acteurs inspirés et inquiétants dans cette nébuleuse tangible et palpable. Chaque petit détail semblant anodin se révèle être une pièce décisive et précieuse d'un immense puzzle qu'on ne se voyait pas construire même si on le voyait se construire. Une nuance différencielle qui fait la réussite de ce film australien, qui a l'avantage de respecter un genre à la lettre sans pour autant tomber dans le vulgaire plagiat.
C'est ce jeu de nuances qui fait toute la réussite et l'efficacité de The Square, car s'il n'est pas dans la réalisation, il devient évident dans la mise en place de la conduite narrative du récit, tant la tension dégagée par chaque scène vous empêche de vous projetter vers une fin qui semblait pourtant inévitable dès la moitié du métrage. Un film qui se vit au présent, et bon dieu que parfois cela fait du bien.
En bref : Avec The Square, préparez-vous à retenir plus d'une fois votre souffle. Ce petit film australien, premier du réalisateur Nash Edgerton, évite de tomber dans la facilité et dans le démonstratif, et s'attache à intensifier une spirale infernale qui doit beaucoup à ses acteurs. Un véritable récital donnant à espérer qu'il faudra désormais compter sur le jeune australien à l'avenir.