Un meurtre (c'est à dire : l'action de tuer volontairement un être humain) peut-il jamais se justifier ? C'est la question de fond que soulève le réalisateur japonais Hirokazu Kore-eda dans The Third Murder, lequel s'ouvre sur une brutale scène de meurtre dans un terrain vague. Le meurtrier asperge ensuite d'essence le corps de sa victime et y met le feu... avant de se rendre à la police et reconnaître son crime.
Comme ce presque sexagénaire, fraîchement licencié par son patron qu'il vient de tuer, a déjà été lourdement condamné dans sa jeunesse pour un précédent meurtre et qu'au Japon, la peine de mort existe toujours, il a sûrement conscience en dénonçant son crime qu'il a toutes les "chances" de payer de sa vie ce nouveau meurtre. Le grand avocat finalement chargé de sa défense se trouve être le fils de celui qui avait évité au meurtrier la peine capitale (mais pas une lourde peine de prison) lors de son premier meurtre. Bien que le procès semble perdu d'avance, le grand avocat va chercher à comprendre le vrai mobile du meurtrier et découvrir petit à petit que l'affaire est beaucoup moins simple et évidente qu'il n'y paraissait de prime abord et que ce deuxième meurtre est à envisager sous un jour complètement différent. Il va se demander d'une façon de plus en plus aiguë si l'institution judiciaire ne commettrait pas une regrettable erreur de jugement en condamnant à mort le malheureux dont il assure la défense.
Il faut un peu de temps pour rentrer dans l'histoire, mais au bout de vingt minutes, on est complètement captivé par la façon dont l'avocat cherche à démêler les fils de l'affaire, par l'application qu'il met à élucider les secrets d'un meurtre (que le réalisateur va nous révéler en une sorte de zoom arrière).
Kore-eda est à la fois le scénariste et réalisateur de ce long métrage qui, parce qu'il demande un vrai effort d'attention et peut paraître un peu austère, risque de faire fuir le grand public. Je l'ai, pour ma part, trouvé malin (jusque dans son titre et son affiche), intelligent, cérébral, bien filmé, avec de rares mais très belles prises de vue extérieures et parfaitement interprété par les trois protagonistes principaux de l'histoire, dont l'avocat Shigemori et l'accusé Misumi.
C'est la première fois qu'un Kore-eda me plaît et m'impressionne autant.
C'est également un film utile, qui pose un vrai problème de conscience.
Et qui chuchote ou suggère les choses sans les imposer.
Je suis sorti de la salle abasourdi. Ébloui.