Dans la sous-culture télévisuelle qui est la mienne, j'ai toujours ignoré un chef-d’œuvre tel que The Truman Show. Des films de super-héros, des enquêtes policières, des comédies à la française, ah ça j'en ai vu à la pelle. Mais quand c'est un film qui critique le fond de commerce de la télé, là les chaînes prétexteront que ce n'est pas vendeur. Comment ai-je pu ignorer l'existence de l'escalier bleu qui mène à la liberté ? Impardonnable. Alors que la télé réalité a envahi nos écrans, et que cette analyse pertinente du phénomène date déjà de 1998, que le réalisateur Peter Weir ne m'avait jamais trop marqué, que l'acteur Jim Carrey n'avait pour moi pour seul atout que le masque grimaçant d'un acteur comique, je suis resté scotché devant un film toujours d'actualité, étonnant et pourtant émouvant.
Truman Burbank est en effet une victime qui subit les événements, une victime sacrifiée sur l'hôtel de l'audimat, une victime d'un nouveau genre de savant fou, le réalisateur de télé, un homme ô combien rationnel, une victime du voyeurisme de chacun d'entre nous, et au-delà une victime de nos attentes naïves en un monde toujours plus parfait.
Andrew Nicol le scénariste décline à la même époque dans Bienvenue à Gattaca les thèmes assez proches du contrôle de la société, du pouvoir absolu de la science et des efforts du système pour éliminer le libre-arbitre. Un système omniscient et omnipotent. Mais voilà qu'un grain de sable va faire capoter l'entreprise savamment élaborée par la chaîne télé autour de sa star de la réalité améliorée Truman.
C'est que Monsieur a des envies de voyage ! Les Fidji, les vahinés, l'Océanie ! Mais Monsieur ne veut pas y emmener sa femme, prétextant qu'une morue est aussi heureuse à Seahaven qu'aux Fidji. N'est-ce pas, en dépit des nombreux obstacles qui vont se dresser sur sa route, le début d'une prise de conscience ?
Jim Carrey est parfait dans le rôle d'un individu confronté à un monde absurde et répétitif, le monde étrange de Peter Weir(d) et personne ne pouvait être plus représentatif que lui. Un homme authentique est carré, Carrey is Truman. Ed Harris est lui aussi parfait pour incarner le personnage de Christof, le démiurge, la quasi divinité d'un monde qui se veut parfait, le Meilleur des Mondes d'Aldous Huxley. Harris, un ami qui vous veut du bien ou Harris, portait d'un sérial qui leurre ?
Peter Weir réussit à créer l'illusion d'un monde tellement contrôlé que l'on en arrive à se poser des questions sur notre propre libre-arbitre dans le monde actuel. Ne sommes-nous pas quelque part programmés depuis notre naissance ?