Capra n'avait pas une grande estime pour ce titre, un passage obligatoire et nécessaire dans le registre du mélodrame pour lui. C'est pourtant un film très plaisant qui ne peut certes pas rivaliser avec ses réussites de la même époque (et encore plus sur les chefs d'oeuvres à venir) mais il serait dommage de le négliger.
Comme à son habitude, Capra soigné l'écriture, les personnages et la direction d'acteurs. Ce n'est donc pas un simple mélodrame édifiant mais une comédie dramatique qui parvient à émouvoir grâce à la justesse de ses comédiens et la concision de sa narration qui tient en moins de 70 minutes.
Handsome est bien incarné par Mitchell Lewis qui possède à la fois une force, un dynamisme et une fragilité palpable qui rend son personnage crédible, bien que totalement pétris de clichés. Il est parfaitement épaulé par Theodore von Eltz qui joue son meilleur ami, un musicien contraint de jouer dans les troquets. Il y a peu d'informations délivrés sur son passé mais la réalisation et son interprétation parviennent à l'enrichir avec une formidable économie de moyen. L'occasion de prouver que Capra n'a pas bâclé la mise en scène car, bien que muet, le découpage repose beaucoup sur la musique diégétique comme le coup de foudre qui se fait à distance quand Dan entend le violon de l'aveugle et accompagne naturellement la mélodie sans rien en connaître.
Et on sent bien qu'il lutte pour ne pas trahir son ami malgré le destin qui le rapproche miraculeusement de celle qu'il aime. C'est là où le scénario m'a plus qu'agréablement surpris. Tous les événements ne semblent jamais forcés ou prémédités et répondent à une logique naturelle. Les personnages se comportent d'une manière "réalistes" (dans les limites d'un film hollywoodien) et ce sont leurs actes qui conduisent la progression du récit.
De plus, Capra n'oublie de glisser quelques gags savoureux dont il a le secret comme le canon d'un pistolet servant de référence pour le diamètre d'une bague. Des petites touches d'humour toujours bien intégré au récit et qui prouve que le film est plus personnel que son cinéaste voulait bien le croire même si la fin n'évite pas quelques facilités prévisibles (et que Capra est moins à l'aise dans les séquences d'actions qui ont l'air d'être un passage oblige). On devine en tout des cas des germes qui serviront à Grande Dame d'un jour.
Voilà bien un film qui mériterait d'être redécouvert et réévalué.