Un documentaire estampillé Arte, ce qui suffit visiblement aux spectateurs de Youtube pour attester à l'unanimité de sa qualité. Pour ma part, je ne me joindrais pas à ces éloges. Il m'a passablement agacé, pourtant il y avait du potentiel. Les images de l'île volcanique Lanzarote valent le détour, c'est bien là sa principale qualité.
Une voix-off vient nous énumérer méthodiquement toutes les difficultés d'un voyage vers Mars, en ne nous apprenant rien de fracassant. Apparemment, Mars c'est très loin et l'Espace est un milieu hostile à l'Homme, je ne m'en doutais pas. Cela dit, cela n'empêche pas tous les scientifiques, astronautes et cosmonautes, de fantasmer sur la planète Rouge. On a le droit à un défilé de scientifiques hors sol qui sont déjà sur une autre planète à vrai dire. Le documentaire ne prend aucun recul sur les énormités qu'ils nous présentent, c'est bien là le principal problème.
Aller sur Mars ? Pourquoi ? Abandonner la Terre à son triste sort ? Quelles avancées pour la condition humaine ? Combien d'argent investi ou devrais-je dire perdu pour d'autres causes ?
Le choix du documentaire est de mettre en valeur les russes souvent négligés au profit des américains. Bien que l'intention soit louable et bien que la culture russe m'attire, cela ne se justifie pas ici. N'oublions pas que c'est la NASA qui fait actuellement les plus grandes avancées dans la course vers Mars, avec son armée de rovers aux noms exotiques. Cela m'amène à évoquer l'impasse faite sur les milliardaires hommes d'affaires qui préparent leur fuite après avoir bien bousillé la planète. Aucune mention n'est faite d'Elon Musk et de son entreprise Space X, ou de Jeff Bezos et de son entreprise Blue Origin, entre autres.
Et oui le documentaire préfère nous abreuver des rêveries d'astronautes et de cosmonautes, qui sont tout disposés à aller servir les intérêts des milliardaires. Comme pour donner le coup de grâce, la voix-off aborde la prise de conscience écologique de Thomas Pesquet. Depuis l'ISS, il a vu que la Terre est en danger et qu'elle est probablement le seul endroit vivable dans le cosmos, mais cela ne l'empêche pas de déclarer qu'il se porterait volontaire sans hésiter pour aller sur Mars.
Les arguments présentés sont absurdes. Par exemple, on nous dit que l'un des plus grands défis de la mission sera de réussir à cohabiter longtemps dans un espace réduit... Dans une expérience, 3 personnes ont vécu 1 an dans 12mcarré pour voir le résultat et sont devenus fous. Mais demandez aux détenus de droit commun et aux prisonniers politiques ce qu'ils pensent de cette expérience. Demandez aux ultra pauvres dans les bidonvilles ce qu'ils en pensent aussi. Autre absurdité : pour les besoins de la mission vers Mars, il va probablement falloir se lancer dans l'économie circulaire, éviter le gaspillage, limiter ses déchets. Si ce n'est pas comique ?
La conclusion de la voix-off est encore plus fracassante : Aller sur Mars est l'aventure la plus excitante du 21ème siècle... J'en conclus que ce documentaire est extra-terrestre, pas un seul intervenant ne semble avoir les pieds sur Terre, ni avoir conscience des problèmes les plus élémentaires rencontrés sur Terre, ça donne le vertige. Si l'humain déployait autant d'énergie pour d'autres causes, je peux vous assurer que y aurait pas autant de misère et de guerre sur Terre.
PS: Je précise que je ne suis pas totalement opposé à la conquête spatiale, bien que sceptique sur les avancées réelles qu'elle apporte à l'humanité. Je précise également que je n'ai pas d'animosité particulière vis à vis de Thomas Pesquet, ou des russes, bien au contraire. Paradoxalement, j'ai pu me passionner pour de nombreux documentaires et films sur le spatial, mais pas celui là. Déjà je n'aime pas la voix-off. Ensuite, son erreur est de se centrer sur la science, mais si celle-ci ne sert pas l'humain, elle est vidée de sa substance. Il y a tout de même quelques passages sympas avec le bras robotique, les images de la Terre et de l'ISS, les sorties extravéhiculaires, et le retour au sol. Ce documentaire aurait pu être dépaysant, mais il a été pour moi frustrant, probablement que je compare un peu trop avec les autres œuvres que j'ai déjà vu sur le même sujet.