Qu'est-ce que Mickael Jackson ? Cet homme, ce dieu devrais-je dire, adulé par des millions de personnes, victime de toutes les rumeurs les plus folles, auréolé de gloire et de mystère. Le roi de la pop, phénomène mondial, irrésistible, attirant et repoussant ; l'expression la plus pure du rêve américain.
Vue de France, Mickael Jackson exprime le plus odieux capitalisme, expression la plus pure de l'économie de marché, celle des dollars flambant neufs qui reposent dans une confortable valise molletonnée, celle du show, grandiose et démesuré. Mais il exprime aussi un art de faire de la musique qu'on envie à l'Amérique parce que c'est exactement l'ambition de notre culture, l'universalisme. Mettez Thriller à n'importe quel gamin du monde, il vous la chantera. Mickael Jackson c'est comme Coca Cola, le symbole mondialisé par excellence, le produit empacté dans un joli paquet cadeau qui vend du rêve. C'est simple, cet homme est la personnalisation de l'Amérique, repoussante et magnifique, le visage refait, les traits tirés, une voix extraordinaire, du talent en barre, surdoué en tout. Un génie tout mozartien mais aussi celui d'un afro-américain qui accomplit le rêve américain tout en restant l'esclave de ce système : bête de foire, trainée dans tous les zéniths du monde dès la plus tendre enfance, bête de cirque atypique, se trémoussant comme nul autre dans des salles endiablées. Démesure et décadence. On l'aime et on le hait. On l'aime parce qu'il a tout fait mieux que tout le monde : des clips géniaux, des morceaux rythmés, enflammant la terre entière. On le déteste parce qu'il est réservé, mystérieux voire tendancieux, excentrique dans ses costumes boutonnés, avec ses postiches, son nez refait et son air efféminé.
Mais Mickael Jackson c'est la figure tutélaire de toute une génération, des années 80 à 2000, celle de la télévision, celle du direct, celle des show dantesques et des chorégraphies impressionnantes. On oublie parfois le musicien excellent, le compositeur et l'arrangeur au détriment de son instinct de star en lui, la bête de scène - qu'est ce que ça devait envoyer un de ses concerts. Dans le top 10 des personnalités de ces dernières décennies tant son fantôme continue d'hanter notre subconscient, tant son rythme reste dans la peau, tant il est le symbole de par sa vie, son parcours et ses errements de notre société et de notre monde. L'accomplissement parfait, idyllique et dramatique du rêve américain, jusqu'au-boutisme tragique d'un homme qui a mangé le monde et par un effet retord s'est fait dévoré à son tour, fulgurance d'une étoile disparue trop tôt, à l'instar des génies, à 50 ans à peine, Mickael avait déjà, et pour toujours, changé le monde.
Thriller est l'expression de tout cela : un clip hors de prix, génialement réalisé, une chorégraphie mythique, un air entrainant. Un succès total, qu'on ne peut d'envier.
Mickael Jackson c'est simple : c'est l'Amérique avec un grand A, c'est Disney-Mcdo-Coca, une Amérique rêvée, cauchemardée, conspuée mais adulée, l'Amérique universaliste au sommet de sa puissance et de son talent.