THUNDER ROAD (13,3) (Jim Cummings, USA, 2018, 91min) :


Sous la forme d'une vacillante dramédie, cette véritable odyssée intime narre l'histoire de Jimmy, un policier texan qui vient de perdre sa mère, et tente comme il le peut d'élever au mieux sa fille quand il en a la garde, malgré le destin qui sème sur sa trajectoire un tombereau d'emmerdes.


Découvert au festival de Sundance 2018, puis bien apprécié à L'ACID du Festival de Cannes 2018, Thunder Road nouveau film coqueluche estampillé "indépendant" débarque sur nos écrans après avoir trouvé récompense avec le Grand Prix au Festival américain de Deauville 2018, faisant ainsi de l'inconnu Jim Cummings, la révélation de l'année ! Véritable homme orchestre assurant la responsabilité d'être réalisateur, scénariste, acteur, monteur, producteur, compositeur mais la colombe blanche en moins, Jim Cummings recycle son court métrage éponyme, récompensé en 2016 à Sundance, pour étirer celui-ci dans son premier long métrage s'apparentant à un authentique film-performance.


D'entrée lors d'une épatante scène introductive illustrée dans un plan-séquence d'une dizaine de minutes où la caméra dans un lent travelling avant vient se rapprocher au plus près de Jimmy Arnaud, grand escogriffe simple flic venu rendre un dernier hommage à sa mère décédée, le one man show se met en place en même temps que l'on fait la connaissance avec cet anti-héros bancal. Pour honorer la mémoire de sa maman, Jimmy Arnaud tente de faire écouter dans un magnétophone d'enfant la chanson Thunder Road de Bruce Springsteen sans y parvenir et après avoir bafouillé quelques phrases erratiques improvise une chorégraphie dansante devant une assistante médusée d'assister à cette démonstration pathétique et impudique. À travers cette oraison funèbre gênante et tragiquement burlesque le cinéaste propose déjà toutes les contradictions du personnage et l'inaugurale mise en scène radicale n'offre aucun contrechamp, actant d'entrée de jeu le ton du film, et son cadre trop figé, sonne comme le révélateur des intentions du réalisateur.


La suite n'apportera en effet que trop peu de déclinaisons et de variantes à ces méandres intérieurs dont Jimmy Arnaud, homme sur le fil du rasoir, n'aura de cesse de s'empêtrer à travers des redondantes saynettes comme des sketchs théâtraux où l'on observe cet homme au bord du gouffre, réagissant à contretemps, ayant du mal à gérer ces émotions, dans une déclinaison du livre de Jacob ou dans une satire de la loi de Murphy. Les personnages secondaires sont malheureusement trop peu étoffés pour exister vraiment et n'existent que pour renforcer les travers de ce flic maladroit qui va quasiment tout perdre petit à petit par négligence, maladresse ou malchance. Jim Cummings s'emploie constamment avec égocentrisme et sincérité maladroite, par le biais de nombreuses gesticulations et nombreux agaçants effets théâtraux dans son jeu (à la limite de la caricature), pour nous emporter dans sa folie. L'acteur-réalisateur réussit finalement par le biais de son abatage en forme de stand-up à nous attendrir réellement dans la dernière partie du film, malgré une narration programmatique convenue, où la fausse virilité laisse concrètement la place à la fragilité, pour accoucher enfin d'un loser magnifique et émouvant.


Venez découvrir avec bienveillance l'étonnante sensation du moment, où à travers le portrait tragi-comique d'un homme au bord de la crise de nerfs, c'est le reflet de toute une partie de l'Amérique qui trébuche, ne rêvant que de jours meilleurs en empruntant Thunder Road. Tendre. Bancal. Touchant.

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le 12 sept. 2018

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