Timbuktu ne manque certainement pas de qualités, et on retiendra surtout sa présentation des acteurs, civils comme djihadistes, juste et nuancée, ou encore sa photographie exceptionnelle. On a aussi droit à quelques moments de grâce poétique comme l'hommage à Blow Up avec la partie de foot sans ballon très à propos. Toutefois toute la teneur dramatique de l'œuvre bat un peu en brèche. Les histoires sont morcelées et finalement peu intéressantes si on leur enlève leur nature politique et actuelle (le drame qui secoue Kidane, axe narratif majeur du film est finalement plutôt ennuyeux). Sissako se garde bien de trop esthétiser les horreurs que les djihadistes imposent (notamment la scène de caillassage) mais se prend (parfois) les pieds dans le tapis lorsqu'il faut mettre en image les émotions de ses personnages : la mort de GPS, filmée comme le cerf de The Deer Hunter alors qu'on en est à des lieux en terme d'intensité dramatique, le trop long plan de Kidane qui traverse le lac... Et tout ça c'est un peu dommage parce que Timbuktu reste quand même un film brûlant d'actualité, qui parvient à articuler son terrible message et qui vient nous rappeler que les choses ne sont jamais aussi simples que ce qu'elles peuvent laisser à penser, à l'instar de ces djihadistes en herbe qui ne comprennent pas pourquoi ils doivent arrêter des musiciens chantant à la gloire d'Allah.