Nigel Slater, éminent cuisinier de renommée international, voit son autobiographie être transposée à l'écran. Biopic passionnante, elle s'attelle à divers sujets, dont son enfance et ses relations familiales, sa difficulté à accepter le décès de sa mère, sa passion pour la cuisine, et plus brièvement sa sexualité, car il n'a jamais caché qu'il était gay. La plus grosse partie se concentre néanmoins sur la rivalité qu'il entretiendra avec sa belle-mère, d'abord femme de ménage, avant que son père succombe à ses charmes, et le combat que tous deux se livreront afin d'attirer l'attention du père, en mitonnant des plats toujours plus succulents.
Commençant sur un ton dramatique, il ne s'endort pas non plus sur la mort de la mère, afin d'éviter le mélodramatique, mais il n'en reste pas moins que son ombre plane, et influence notre jeune héros tout du long. Elle n'a pas été une mauvaise mère, simplement elle n'était pas faite pour être femme au foyer, et même les conserves elle les loupait, ce qui faisait souvent terminer les repas en toasts, d'où le titre du film. Une motivation donc pour ce jeune homme qui rêve depuis son enfance d'enfin manger quelque chose de bon, qui se délecte la nuit en lisant des livres de cuisine sous sa couette, et qui n'a de cesse de développer ses connaissances afin d'avoir le talent que sa mère n'a jamais eu.
Le texte d'introduction sème un doute, expliquant que l'histoire est faite à partir de souvenirs d'enfance et que certaines parties ont été « romancées », tel est le terme. Difficile de déceler donc le vrai du faux, Madame Potter, la belle-mère, était-elle si exécrable et si maléfique ? Des points d'interrogations sur la véracité de cette biopic, mais quoiqu'il en soit ils n'entachent pas l'oeuvre elle-même, au contraire, les libertés permettant à Helena Bonham Carter d'user du même potentiel qu'elle délivrait dans Fight Club, nous livrant quelque chose de très similaire, froid, exubérant, inquisiteur et clope au bec.
Bref, Toast est une histoire émouvante, efficace dans ses instants comiques comme dans ses passages dramatiques, et servie par des acteurs tous plus justes les uns que les autres.
On lui reprochera un passage sur la sexualité un peu court, introduit maladroitement et donnant l'impression de tomber comme un cheveux sur la soupe, mais c'est bien le seul grief que l'on pourra avoir à son encontre.
Visuellement il n'y aura rien à redire, la photographie étant assurée par Balazs Bolygo, qui s'est illustré récemment avec Centurion, de même que la bande-son signée Ruth Barrett, et sans oublier la sélection musicale, d'un goût exquis, principalement composée de vieux tubes français, dont « Ne me quitte pas ». La reconstitution d'époque et également à saluer, la multitude de détails, en particulier dans la cuisine, renforçant encore plus la crédibilité de l'ensemble.
Pour conclure, les amateurs de récits d'enfance ainsi que de thèmes sur la reconnaissance paternelle et la rivalité beau-fils/belle-mère auront toutes les raisons de succomber aux charmes de cette oeuvre délicate fleurant bon le rétro. Dur de déterminer qui ne pourrait en revanche pas adhérer à l'oeuvre, mais à moins d'être hermétique au genre, il n'y a aucune raison qu'il ne trouve pas son public.
Mention spéciale pour Helena Bonham Carter, qui bien qu'elle ne s'éloigne pas de ses rôles habituels, notamment ceux lui étant offerts par son mari, redouble d'ingéniosité pour rendre son personnage encore plus détestable qu'il ne l'est déjà. Véritablement savoureux.
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