Mais où sont donc passés le sens de la réplique et le rythme des dialogues (Barbershop, 2002), la capacité à donner vie à un univers de papier coloré (les deux volets de Fantastic Four, 2005 et 2007), l’attachement au buddy movie (les deux films Ride Along, 2014 et 2016) ? Trois qualités qui auraient dû permettre au réalisateur Tim Story de réussir cette nouvelle adaptation des aventures de Tom & Jerry au cinéma, après la catastrophique version de 1992 (Phil Roman) qui dénaturait nos deux héros en les transformant en meilleurs amis chanteurs. En lieu et place, une production indigne de l’esprit du cartoon et irrespectueuse de la caractérisation des personnages originaux, plus proche du Woody Woodpecker de 2017 (Alex Zamm) dans lequel le pic vert mutait en un épileptique obscène et péteur.
Nous ne saurions dire ce qui ici est pire : ou les prises de vue réelles, mêlant des acteurs à côté de la plaque à des plans urbains stériles, ou les effets numériques hideux qui aplatissent chat et souris, dépourvus de la moindre consistance. Le long métrage confond la vitesse d’exécution des gags et des coups portés, noble savoir-faire d’un âge du dessin animé, avec l’empressement illisible, suivant la conviction que les enfants d’aujourd’hui, malheureux spectateurs de ce genre de programmes, ont une attention si limitée qu’il faut en stimuler la rétine à intervalles réguliers. Pourtant, il n’y a rien à montrer, et je plains de tout cœur celles et ceux dont le premier contact avec Tom & Jerry se fera ainsi. Inventer des héros idiots à l’image de l’idiotie contemporaine est une chose, dénaturer les héros profonds d’autrefois en est une autre et n’est pas acceptable.