Tournée fait parti de ces films qui vous en mettent plein la tête, qui vous remuent de l'intérieur, qui vous touchent et vous perturbent, mais qui, surtout, vous font voir, le temps d'une journée, au moins, votre univers autrement.
Pendant deux heures nous adoptons le regard d'un artiste (car il faut bien le dire, le film est d'une esthétique remarquable) et nous contemplons ce qui nous entoure : une troupe de strip teaseuse, adepte du mouvement "new burlesque", sous la direction d'un producteur de télévision visiblement raté, reconverti dans le milieu du "show".
Parlons tout d'abord des personnages, car ils sont magiques. Pas simplement parce que nous avons sous les yeux des femmes décomplexées malgré leur physique "alternatif", non, ce serait bien trop simple d'en rester là. Simplement parce que ces femmes brillent, elles sont resplendissantes, belles, que ce soit par leur corps et par leur être.
Nous avons aussi, a côté d'elles, Joachim, le producteur, interprété par Mathieu Amalric, et qui est, dans ce rôle, absolument brillant. On lui retrouve parfois une certaine pâte gainsbourgeoise, oui certes, il y a un peu de "copie", mais peu importe, car il intègre parfaitement son personnage. Un personnage un peu paumé, qui revient d'une expédition en Amérique (pourquoi, comment, dans quelles conditions, on ne sait pas, et peu importe!).
La solitude des uns rencontre le passé des autres, en conservant une distance qu'on pourrait montrer du doigt, car elle créé des frustrations - il nous manque toujours un bout de l'histoire, un bout de l'explication... Mais, à mes yeux, ce choix est judicieux car il permet de respecter et même de mettre en valeur la notion de l'intimité. Ce sont de vraies relations que nous avons sous les yeux, même si elles suivent un scénario fictif. Le fait de respecter une distance "naturelle" entre chacun des personnages donne une dimension supplémentaire de réalité. Car, nous n'avons aucune raison de connaitre le passé de Joachim s'il ne nous en a pas parlé. Barrière de l'intime ou barrière de la langue, le fait est qu'il ne se confie pas. Nous restons donc dans une ignorance "voulue", par le personnage et par le réalisateur. Une ignorance humaine, intime.
C'est sans doute le côté du film qui m'a le plus marqué : ce choix d'intimité, c'est tout simplement génial, ça entraine et ça nous en met plein les yeux, c'est profondément humain.
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