On va finir par parler d’exception culturelle tant l’animation française parvient à tirer son épingle du jeu ces dernières années, de Phantom Boy à Avril et le monde truqué, pour ne citer que des exemples récents.
Tout en haut du monde est un enchantement : aux antipodes de la 3D rutilante qui domine le marché, il décline ses paysages en aplats fauves, avec une simplicité du trait confondante. En adéquation avec sa forme, c’est la pudeur qui domine dans cette histoire qui mêle aventure, émancipation féminine, quête géographique et filiale.
L’héroïne, Sasha, fait tous les apprentissages : de la vie de labeur, à travers une très belle séquence de sommaire qui la voit s’initier au rude quotidien de serveuse, elle qui sort des salons aristocrates du St Petersbourg de la fin du XIXème siècle ; de l’aventure marine à travers la quête du pôle nord, de l’expérience du deuil et de l’adversité climatique.
Sans emphase, par la grâce d’une mèche blonde qui court le long du visage où de couchers de soleils sur la banquise, Rémi Chayé atteint un point d’équilibre d’une rare délicatesse : aux thèmes essentiels de tout récit initiatique se superposent les beautés saisissantes de décors grandioses. C’est une leçon essentielle du cinéma d’animation que de rendre ainsi palpables le froid, la vague et le découragement d’un équipage face à la ténacité d’une jeune fille solaire et téméraire.
Pour parfaire la composition, la musique, sur un thème de violoncelle ou empruntant à Syd Matters deux de ses plus beaux titres, dit toute l’élégance d’une telle entreprise.
Une splendeur à défendre.