Une œuvre très curieuse, incroyablement inégale, tout en étant profondément personnelle et d'une immense richesse thématique.
On se rapproche de la fable du génial et trop méconnu Leo The last avec qui il partage un certains nombres de points communs sans en avoir toute la maîtrise.
Le film devait initialement se dérouler à Londres, non à New-York, ce qui aurait été sans doute mieux correspondu à sa sensibilité européenne. Dans le même ordre d'idée, Tout pour réussir avait été écrit pour Sean Connery et on a en fait l'impression que tous les comédiens sont des seconds choix. Il est difficile de ne pas penser que le personnage de "Shitty" ne fut pas conçu pour Lee Marvin par exemple.
Le casting est donc assez raté je trouve avec des comédiens pas vraiment convainquant et qui n'apportent pas l'étoffe à des caractères assez peu développés au final, pour ne pas dire unilatéraux et stéréotypés (à part le père).
John Boorman n'est exempt de toute responsabilité non plus et peut livrer des moment inspirés comme il peut se contentee du service minimum à d'autres, surtout lors du dernier acte où il ne semble pas avoir trouvé de conclusion à la hauteur de son sujet et de ses nombreux sous-thèmes car il est bien difficile de ne pas reconnaître une réelle ambition dans l'écriture et la forme. Boorman y parle évidement beaucoup de lui, de la place des artistes dans un monde capitaliste avec une grande sympathie pour les marginaux, les rêveurs et les intellectuels lunaires... On y croise un désigner de mode, un inventeur de jeux-vidéos, un ancien danseur et prestidigitateur, une peintre qui ré-interprète des tableaux célèbres avec du body-painting, une étudiante qui fait sa thèse sur le spiritisme... Face à ces multiples créateurs, Boorman oppose symboliquement donc le père de famille, spécialiste lui de la destruction, qui y trouve cependant une certaine poésie (très curieux d'ailleurs de ne pas songer désormais au 11 septembre en voyant le film). Celà dit, cet homme s'oppose au monde de la finance et cherche à revenir à un système plus indépendant, loin d'un fonctionnement quasi abstrait où les ordinateurs ont déjà pris le dessus.
Vu son potentiel, Tout pour réussir est souvent un peu décevant dans ses orientations, ses concessions, ses seconds rôles, sa musique, sa direction d'acteur pour un traitement qui ne creuse pas son sillon autant qu'il le pourrait. En même temps, le film dégage quelques chose de terriblement attachant, y compris via ses imperfections. On sent la présence d'un auteur, d'un cinéaste, d'un esthète passionné et d'un philosophe chaleureux et bienveillant. Après tout, c'est ce que dit son titre original : Where the heart is et tant pis pour ses maladresses et ses lacunes.