Tramontane : une crise identitaire collective.

Tramontane : une crise identitaire collective.

Tramontane (Rabih de son nom original) est le premier film de Vatche Boulghourjian, un réalisateur libanais de 2016. C'est l'histoire d'un jeune chanteur/musicien aveugle du nom de Rabih souhaitant accompagner sa chorale à l'étranger. Pour cela, il doit faire un passeport, rien de plus normal, me direz-vous. Sauf que cela ne va pas se passer comme prévu et il va découvrir quelque chose qu'il n'aurait probablement pas du : sa carte d'identité est fausse.
C'est à partir de là, que commence l'aventure de Rabih pour trouver des réponses. Qui est-il ? D’où vient-il ? Il va se lancer dans une véritable quête identitaire afin de connaître la vérité.
Hélas, cela ne va pas être de tous repos car tous les gens autour de lui semblent "avoir perdu la mémoire" ou mentir. Difficile de démêler le vrai du faux.
L'ayant vu une première fois en VO, en avant-première et les critiques à son sujet n'étant pas unanimes, un nouveau visionnage en VF était de rigueur.

Le film avait un bon postulat de départ, une histoire et des personnages auxquels on veut croire. L'histoire en elle-même est très bien narrée et criante de réalisme. Se passant après la guerre civile du Liban, c'est pays en pleine reconstruction social qui nous est montré à l'écran. La quête identitaire du personnage principal n'est pas seulement la sienne mais aussi celle de tout un pays affecté par la guerre. L'acteur jouant Rabih, Barakat Jabbour lui aussi aveugle et musicien, va réussir à nous plonger dans son histoire et à éprouver de la compassion pour le personnage mais aussi pour tout un pays, à défaut de pouvoir s'identifier à lui. Un autre point notablement réussi et la photographie, le film nous plonge dans des espaces sublimes et majestueux.
Si ces points regroupent les critiques, il y en à malheureusement d'autres qui les divisent.
On pourra par exemple regretter un peu que la quête soit trop linéaire : aller voir un personnage A qui donne sa version de l'histoire et qui renvoi vers un personnage B qui donne une autre version et qui renvoi vers un personnage C ….
La musique tiens dans ce film une place très importante. Car c'est avec celle si que Rabih va pouvoir se retrouver et échapper à la réalité. Cette échappatoire a un lien direct avec le patrimoine culturel et la tradition de son pays : cela montre que tout espoir n’est pas vain.
Rabih chante sa déchirure et son désespoir, et c’est le fait de l’exprimer qui va permettre l’acceptation et enfin l’apaisement de ces meurtrissures.
Cet aspect qui fait toute l'identité du film est malheureusement mal dosé, mettant les musiques et les chansons en marge du film, faisant des scènes à part entière. Il aurait pu être préférable de les placer de manière extradiégétique afin de raccourcir le film et le rendre moins vide. Car si le film se veut volontairement long afin de mieux faire ressentir la détresse de son personnage, on pourra tout de même lui reprocher de l'être trop, ce qui peut perde à plusieurs moments le spectateur. (Surtout lorsqu'il est projeté après le repas, en pleine digestion.)
Le contexte de visualisation est aussi un point important pour un film car la manière de le regarder va aussi influencer l'avis que l'on s'en fait. Le moment de la projection et le fait que le film soit en VOSTFR lui a fait perdre la majorité de la salle, ce qui est dommage pour une histoire aussi intéressante. La VF n'apporte rien et, au contraire, fait perdre l'identité et l'immersion du film.

En conclusion, Tramontane est un film inégal qui n'a pas su séduire son public à cause de sa longueur et de sa répétitivité, malgré son histoire captivante.

Je lui donne la note de 6,5/10.