Voilà n'est pas coutume, le cinéma indien nous propose autre chose que les bien trop stéréotypées comédies musicales de type bollywood. Loin de ces grosses productions au charme fade et désuet, Trapped se rapproche du cinéma indépendant et ne s'enferme pas dans des codes culturels et esthétiques contraignants, même s'il dévoile en toile de fond une certaine image de l'Inde plus réaliste et moins idéale (promiscuité, mariage forcé, tabou de l'amour, place de la religion, cuisine locale, ingéniosité et débrouillardise, ...).
Tout d'abord soulignons le mérite de Vikramaditya Motwane qui parvient à réaliser un film tenant la route avec des bouts de ficelles - à l'image du protagoniste, Rajkummar Rao: un open space, un couple, puis un appartement (presque) vide dans une tour en chantier - et donc inhabitée. Guère plus, à l'exception de quelques accessoires (un portable, un télé plasma, quelques meubles sommaires, des toilettes). Avec tout cela, le cinéaste bricole donc un film fait de bric et de broc dont le plus remarquable nous semble la tension qu'il parvient progressivement à installer à mesure que les possibilités du personnage de quitter l'état l'enfermement dans lequel il a été malgré lui installé s'amenuisent. Citons aussi la variété émotionnelle qu'il dépeint au long de cette captivité forcée, le personnage passant de l'amour à la solitude, de l'admiration au dégout, de la peur au courage, de l'espoir à la résignation puis de l'ingéniosité à la (presque) folie. En plus, malgré la perception presque tragique du personnage sentant dans ses moments de résignation son destin comme un mal implacable, Motwane atténue ce côté plus sombre avec des moments de comédie faisant contrepoids à la charge dramatique.
Cependant, il est dommage qu'il n'ait pas plus exploré la profondeur psychologique du "prisonnier" et ait surtout centré son intrigue sur l'action du personnage et les moyens qu'il met en place pour sortir de son piège. Par ailleurs, en raison d'un montage parfois incohérent, l'accent est mis sur des scènes révélant ce qui aurait dû être caché, rallongeant d'autres scènes ne méritant pas autant d'attention et enfin coupant d'autres scènes qui aurait mérité un traitement plus long pour transmettre la souffrance intérieure du personnage. Enfin, l'utilisation de la caméra comme un moyen, un outil plutôt que comme une finalité en soi limite la portée esthétique du travail et n'offre hélas aucune prise de vue osées.
En guise de conclusion, et afin d'élargir la critique, il est assez ironique de constater que l'homme qui est devenu malgré lui captif échappe en fin de compte au mariage - une autre prison, diront certains - pour déboucher sur une vie convenue et un travail qui l'emmure dans un paradoxal open space. Le cinéaste y aurait-il pensé? Nous n'oserons l'affirmer de manière péremptoire mais suggérons-le quand même.