Parenthèse enchantée avant de replonger dans un monde post-apocalyptique à mille à l’heure, Trois mille ans à t’attendre de George Miller joue des coudées franches pour créer des étincelles de cinéma. Spoilers.

Dans une chambre d’hôtel à Istanbul est contée une histoire de plus de mille et une nuits entre un djinn abandonné (Idris Elba) et une narratologue solitaire (Tilda Swinton). Miller adapte une nouvelle datant de 1994 écrite par A. S. Byatt et qui s’intitule Le Djinn dans l’œil-de-rossignol. Très peu s’y sont trompés, le but premier de Trois mille ans à t’attendre est d’évoquer cette tradition des histoires, aussi ancestrales soient-elles, rognée par la place de la science dans l’explication de tout ce monde qui nous entoure.

Lapalissade s’il en est, en tout cas pour qui aura déjà bu son lot de culture, George Miller évacue directement ce propos, certes évident, par le biais d’une conférence donnée par Alithea la narratologue. D’ailleurs la suite du récit se détache de cette approche théorique pour en donner tout du long une seule illustration pratique. Et Alithea, prénom qui peut signifier guérisseur en grec, lève le voile dès le départ sur l’ambition de ce qui suivra, dans le film pour nous, dans le livre qu’elle écrit pour elle. Ce qui se passera sera une métaphore filée, composée par (et pour) elle seule, pour se guérir d’une vie mise dans un carton qu’on devine assez douloureuse, entre un mari parti et un enfant perdu (l'échographie d'un foetus).

Ce thème de la guérison, ici mentale, non pas physique, évoque évidemment les premières préoccupations de George Miller qui aurait en effet bien pu finir médecin. Se met alors en place dans le film, et dans la tête d'Alithea un ensemble hétérogène de visions boostées aux effets spéciaux, un amalgame de feu et de poussière qui provoque à de nombreux moments des reprises de souffle visuelles qui rassurent sur le fait qu’il restera quelque chose du cinéma en 2022.

Aussi que pouvait-elle inventer d’autre qu’un djinn pour guérir intérieurement ? En effet s’accole à cette entité un type de péripétie assez idéal, celle de pouvoir réaliser les voeux du plus profond de son coeur. Sans forcément tous les réaliser certes. Mais en tout cas celui de retrouver l’amour, un amour forcé, un amour bien sûr creux, qui ne viendra que d’elle-même mais qui réussira à redonner de la saveur à ce qui n’en n’avait plus.

Voir un réalisateur nous rappeler, que les histoires ne servent pas qu’à expliquer, illustrer, démontrer, exposer. Qu’elles peuvent aussi nous soigner à condition de bien se les conter dans son for intérieur, jusqu'au point où notre imaginaire contamine notre réel, comme un petit remède se baladerait dans nos veines, pour vraiment tirer quelque chose de ce qu’on ne vit bien souvent que comme une simple diversion de l’esprit, un vain divertissement, ça fait du bien.

-Thomas-
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le 24 août 2022

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Vagabond

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