Ça commence à se bousculer un peu pour le titre de pire film de l'histoire du cinéma, si longtemps Plan 9 From Outer Space est resté fièrement en haut du podium d'autres films prétendant lui rafler la place sont apparus au fil du temps comme The Room, L'Incroyable Bulk , Birdemic et donc Troll 2 de Claudio Fragasso qui officie sous le pseudonyme de Drake Floyd. Cette vraie fausse suite de Troll est produite par Joe D'Amato (sous le pseudonyme de David Hills) et tourné aux USA avec une équipe 100% italienne parlant un anglais niveau 4éme. Avec des comédiens débutants venus au départ pour être figurants et ne bitant pas un mot d'italien , le film possède tout de même de sérieux arguments pour devenir un mètre étalon du nanar. Le film devenu culte en grande partie grâce à des memes Youtube fait depuis l'objet aux USA de projections digne du Rocky Horror Picture Show. Le plus drôle c'est que son réalisateur reste persuadé d'avoir fait un bon film au point d'être consterné devant les salles hilares et de se fâcher avec ses acteurs qu'il traitera de chiens avant de se casser en pleine séance de questions réponses avec des fans du film. Pas franchement beau joueur le Claudio d'autant moins que ce sont les fans de nanars qui finalement auront construit la notoriété internationale d'une production qui sans eux ce serait retrouvée condamnée à l'oubli. Troll 2 est certes un fabuleux nanar de compétition mais le script de Rossella Drudi (Femme du réalisateur) , sorte de cauchemar végan, prend une amusante connotation prophétique avec certaine préoccupations de notre époque.
Dans Troll 2 , nous allons suivre une famille qui part en vacances dans un bled paumé, la charmante bourgade de Nilbog, afin de retrouver la quiétude du monde d'avant. Le fiston de la famille va être mis en garde par les visions de son grand père décédé depuis six mois l'informant que les gobelins des histoires qu'il lui racontait autrefois existent vraiment. En effet la famille se retrouve dans un village de vilaines créatures qui ont pris l’apparence de mauvais acteurs, oups pardon je voulais dire de villageois taciturnes et peu accueillants.
Pour résumer un peu plus en profondeur l'intrigue improbable de Troll 2 on se retrouve donc avec des gobelins (oui Troll c'est juste pour le titre) avec l'apparence de rednecks et qui sont dirigés par une sorcières. Ils sont visiblement en quête de nourriture végétale faites à base d'humain transformés en gelée verte après avoir ingurgiter des produits locaux à base de trucs verts. La bouffe occupe donc une part très importante de Troll 2 et c'est même le nerf de la guerre d'un film dont le message pourrait être green power, mangez bio et mangez des légumes ! Après pourquoi nos créatures véganes mangent ils des humains transformé en une gelée qui ressemble à une gerbe d'écolo après une overdose de petit pois arrosée au Get 27 et non des feuilles, de la mousse et des glands ?? Vous irez demander à Claudio . Du coup le but de nos créatures déguisées en braves paysans c'est de faire bouffer des trucs verts aux visiteurs ce qui nous donnera quelques séquences hallucinantes de connerie mais absolument hilarantes. Alors que la petite famille s'apprête à faire ripaille d'un succulent buffet offert par la maison, le gamin est informé par son grand père mort qu'il doit absolument empêcher le reste de la famille de manger et lui donne un coup d'avance en stoppant le temps pour trente secondes (Les comédiens restent figés en tentant désespérément de ne pas bouger) . On se dit que le bougre de sale gosse va renverser la table, tout foutre à la poubelle, et bien non, il va grimper sur une chaise et pisser fièrement sur la nourriture. Fatalement le gosse sera puni par cette famille ingrate incapable de comprendre qu'ils étaient à deux doigts de ressembler à du smile vert fluo et ce malgré la touchante supplique la mère : "Mais non Joshua n'est pas un gros cochon, c'est un enfant hypersensible" . Une fois dans sa chambre le gamin sera sermonné par son père ce qui nous vaudra ce dialogue d'anthologie : "Tu pisses sur l'hospitalité c'est intolérable". Et ce n'est pas terminé car ensuite on voit le père défaire son ceinturon face au gamin effrayé qui conscient qu'il va recevoir une bonne dérouillée lui demande tout de même ce qu'il va faire, et là attention pour les personnes sensibles le père répond : "Je resserre ma ceinture d'un cran pour ne pas perdre mon pantalon. Ah tu veux jouer les durs et me pousser à bout, tu veux faire une grève de la faim ? Parfait, je relève le défit mais moi à ton âge j'ai vraiment connu la faim et je ne vais pas craquer avant toi , pour ce qui est du jeun j'ai plus d'expérience que toi. Tâche de méditer ça petit con !!!" (Bon, le petit con c'est ma touche perso). Quelques séquences plus tard la petite famille se retrouvera assiéger dans sa maison par les villageois qui leur balanceront un sac en papier en hurlant vindicatifs : "Voilà des sandwichs, avec eux votre mort sera plus douce, sinon on vous tueras quand même mais votre mort ne sera que souffrance". Franchement à tel niveau de What The Fuck dans les dialogues et les situations je me demande si Claudio et Rossela n'avaient pas fumer le jardin. Mais le summum du summum est une scène qui m'a fait vraiment pleurer de rire vers la toute fin du film. Alors ça va spoiler un poil et si vous voulez vous préserver de l'effet de surprise lorsque vous regarderez le bousin rendez vous quelques lignes plus bas.
Vers la fin du film le grand père refait une apparition pour donner une arme secrète à Joshua afin de terrasser les gobelins ( bon il aurait pu lui refiler plus tôt mais passons) et alors que le gosse se retrouve acculé par les vilains gobelins il va sortir de son sac l'arme ultime, véritable Excalibur contre les véganes aussi puissante qu'une bombe à neutron dopée à la kryptonite, un sandwich jambon salami !! Et là les gobelins explosent dans de jolies gerbes de sirop de menthe verte tandis que la sorcière tente de raisonner le gosse : "Nooooooon jette ça avec ce gras tu vas avoir du cholestérol et les artères bouchées" …. Oh putain, j'ai eu l'impression d'être devant un planche absurde de Fabcaro et ce "Jette ça" est encore plus drôle que le "Fais pas le con pose ce poireau", j'étais juste plié de rire. Claudio merci, je t'aime !!
Légende ou vérité, il semblerait que l'intégralité du casting ce soit fait avec des gens qui venaient au départ pour être figurants. En tout cas pour 95% des comédiens il s'agit de leur tout premier rôle (et parfois dernier) et franchement ça se voit un petit peu d'autant plus que le scénario, les dialogues et la direction d'acteurs sont faits ne l'oublions pas par des italiens pas toujours très à l'aise avec l'anglais. Tout d'abord il y-a le jeune Michael Stephenson qui incarne Joshua, un gamin tellement insupportable et tête à claque que l'on voudrait qu'il meure immédiatement dans d'atroces souffrances. En brave père de famille on découvre Georges Hardy, redevenu dentiste depuis, qui tente de jouer au patriarche autoritaire et protecteur. La jeune Connie McFarland interprète Holly, l'adolescente rebelle de la famille qui nous gratifiera d'une formidable et très drôle chorégraphie type Flashdance face à miroir avant d'être interrompu par le fantôme du grand père interprété par Robert Ormsby. Quant à Margot Prey dans le rôle de la mère, elle passe quasiment l'intégralité du film avec les yeux écarquillés d'un lapin pris dans les phares à tel point que l'on pourrait se demander si elle possède vraiment des paupières. Mais la palme du cabotinage en roue libre revient incontestablement à Deborah Reed dans le rôle de la sorcière Creedence Leonore Gielgud dont les grimaces et les gesticulations feraient passer Louis de Funes pour une modèle de sobriété. Il faut tout de même noter que la sorcière est tellement chaude de la cuisses qu'elle fait du pop-corn en suçant des épis de maïs. Et puis j'aurai aussi une pensée émue pour les figurants anonymes condamnés à bouffer de la gelée verte afin de jouer des gobelins hideux sous des masques inexpressifs en carton pâte avec des fringues en toile de jute qui grattent le cul vu comment ils gesticulent quand ils bougent. Le reste je vous laisse le découvrir le film ressemblant à un puit de conneries sans fond.
Vingt ans après sa sortie, Michael Paul Stephenson (le gamin du film) a réalisé Best Worst Movie qui revient sur le phénomène Troll 2 devenu culte aux USA. Beau joueur, ou presque, Claudio Fragasso a déclaré avoir beaucoup aimé le documentaire qui pourtant ne l'épargne pas vraiment, mais il reste tout de même encore et toujours persuadé d'avoir réalisé un bon film. Pour ma part ça fait bien longtemps que je ne m'étais pas autant bidonné devant un film qui prouve que passé un certain niveau la nullité devient géniale.
Ma Note Nanar : 09/10