Tucker
6.9
Tucker

Film de Francis Ford Coppola (1988)

Réalisé en 1988, entre Jardins de Pierre et Le Parrain : 3e Partie, Tucker fait parti des films que F. F. Coppola, dans une période considérée comme assez creuse, a accepté comme une commande.
Il s'agit pourtant d'un de ses films les plus personnels, projet de longue date qu'il avait commencé à envisager vers 1973, avant la mise en production du premier Parrain. Mais ce n'est que 15 ans plus tard, au grès de ces succès et de ces déconvenues, qu'il finira par revenir à cette histoire, celle d'un homme qui lui ressemble.
Car oui, ne soyons pas dûpe. Monsieur Tucker dans le film, c'est évidemment Coppola lui-même. Et les parallèles entre les déboires de l'un et celles de l'autre sont nombreuses.


Tous deux rêvent d'innovations, de révolutionner leur industrie respectifs en proposant des objets nouveaux et remettant en question des enjeux pratiques et esthétiques. Tous deux défoncent les portes, voient grands, s'embrouillent avec les amis pour finalement se réconcilier, emportent leurs familles dans leurs démeusures. Et tous deux ont un ego légèrement excessifs et des goûts de luxe qui laisse parfois pantois...
A travers le film biographique sur Preston Tucker se dévoile l'autofiction-biographique de Francis Ford Coppola.
Ainsi, tout le film n'est que métaphore (ou presque). La Tucker Corporation, c'est le célèbre studio de production American Zeotrope (fondé avec son ami George Lucas, avec qui il se brouillera, et qui finalement reviendra pour l'aider à produire Tucker, fort du succès de ses Star Wars); l'oncle Abe Karatz, c'est le père Camrine Coppola ; Vera, c'est Eleanor ; quand l'un souhaitait un procédé de ceinture de sécurité, l'autre démocratisait un procédé de retour vidéo direct pendant le tournage...


On pourrait presque s'amuser à lier tous les éléments qui se feraient écho entre la vie de Coppola et l'ambition de Tucker pour concevoir ces fameuses Tucker 48. Un par exemple : Tucker est à court d'acier et de moteur pour construire ses voitures. Un homme mystérieux appelé Howard Hugues lui conseille de racheter une compagnie d'hélicopter qui va fermer et de récupérer les matériaux nécessaires pour ces voitures. En 1979, Coppola, alors en plein dans le tournage infernal d'Apocalypse Now, obtient l'aide de Ferdinand Marcos, alors dictateur des Philippines, afin que celui-ci lui prête les hélicoptères et les avions de chasses de son armée pour les besoins de son film !


Mais se serait oublier que le film ne se repose évidemment pas que sur cette idée, et se veut plus comme un film sur l'American Dream, les hommes qui le veulent et ceux qui les brisent. Idéalisme, humanisme, Coppola fait aussi de ce film un hommage à ceux de Frank Capa, autre grand humaniste d'Hollywood. On retrouve beaucoup de L'Extravagant Mr. Deeds ou de Monsieur Smith au Sénat dans Tucker. C'est l'histoire d'un combat, celui de l'homme voué au peuple face aux puissances véreuses et corrompues (la presse, les gros industriels et le gouvernement).
Les décors du film rajoutent à l'impression de grandeur qui émmane de l'histoire : la perspective immense des hangars à avions transformés en usine de construction automobile renforce le trait profilé des Tucker 48, offrant des voitures parmis les plus belles qu'on ait vu au cinéma. A cela s'ajoute la photographie haute en couleur de Vittorio Storaro, les mouvements de caméras vifs et euphoriques, accompagnés par une bande sonore très jazz qui s'articule parfaitement aux éléments dramatiques. Jeff Bridges met la barre très haute dans le sur-jeu, Martin Landau est particulièrement touchant. Dommage quand même pour les nombreux seconds rôles tenus par des acteurs de premier choix (Elias Koteas, Christian Slater, Don Novello et Mako), des personnages finalement peu exploités. Et très absurde l'appartition de Dean Stockwell en Howard Hugues complètement allumé.


Un film pas comme un autre, touchant sans être renversant. Un Coppola certes un peu oublié, mais qui montre bien que le "Napoléon du cinéma" avait encore plus d'un talent dans son sac.

Thomas_le_Govic
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le 5 mars 2015

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Thomas Le Govic

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