Choisir le film en costume pour faire ses premières armes au cinéma est un choix aussi ambitieux qu'audacieux de la part de la réalisatrice Marion Laine. Eviter de surcroit la reconstitution empesée est un exploit rarement atteint au cinéma et c'est un pari, ici, grandement gagné, L'atmosphère générale est fortement inspirée de peintres célèbres (Courbet, Renoir, Manet et Delatour, surtout) mais ces évocations restent aussi discrètes que visuellement magnifiques, on pense un peu, dans la forme, au sublime Van Gogh de Pialat, par exemple.
Si Marina Foïs peine, au départ, à convaincre dans ce contre-emploi trop flagrant (elle prête même parfois à sourire...), elle finit par devenir parfaite dans le rôle de cette femme au cœur sec et à l'âme frigide.
Sandrine Bonnaire est à la fois terreuse et lumineuse et elle est - une fois de plus - géniale dans ce rôle qui lui va comme un gant (j'ai pensé, encore, à Pialat et à l'illumination d' À nos amours). Elle est de ces comédiennes rares (avec Béatrice Dalle) qui réussissent l'exploit d'être de véritables révélations à chaque nouveau rôle !
Le rythme du film est lent mais s'impose sans aucun ennui, jamais... beaucoup de second rôles sont merveilleux (Noémie Lvovsky, si formidable qu'on aimerait que son rôle soit plus long !) et c'est notamment avec un bonheur absolu qu'on retrouve l'épatant Johan Libéreau (Les Témoins, Douches froides);
L'histoire (très librement inspirée de Flaubert) est simple: deux femmes - une servante et sa maitresse - suivent en parallèle le cours de leur vie sans jamais parvenir vraiment à la gouter pleinement, l'une par impuissance à aimer, l'autre parce que tout ce qu'elle aime et étreint semble systématiquement condamné à lui échapper... la malédiction qui semble frapper ces deux femmes va sensiblement les unir et Marion Laine nous offre là un film vraiment sensible, délicat et souvent très émouvant; Un conte parfois pourtant cruel et ironique et souvent très sombre. Coup de coeur, simple. Emotion !