(Une fois de plus, mon texte avec spoils n'est qu'une pluie de remarques mélangées. Une grêle lourdingue).
Comme pour ses équipes de sport favorites, Woody Allen est encore meilleur à domicile.
Une comédie qui tire vers le haut. Vous élève en vous respectant.
Un bel hommage aux mamans et une invitation subtile à mieux les connaître avant qu'il ne soit trop tard.
Même si c'est un film dont le héros est littéralement "un fils de pute" (je cite), appartenant comme sa petite-amie au "1%" les plus riches du monde, même s'ils s'en défendent:
Titi Chalamet, l'héritier, s'en plaint même:
_"Je n'en veux pas. Ma famille et amis sont une kirielle de bourges ploutocrates. Je me fiche de l'Euro (qui devient 'Yen' dans la version Française et les sous-titres!?).
Ils ne parlent que de leur dernier achat de Basquiat et des avantages des jets Falcon(Français) comparés aux jets Gulfstream(Américains)".
Sélénia Gomez/Séverine Ferrer lui suggère alors de ..."travailler": "Tu pourrais... travailler".
Tout le film est arrosé de blagues de blondes, de name dropping et de beaucoup de placements de produits&lieux...mais dans un flot très 'jouissif' (pardon du cliché): un plaisir des yeux, des oreilles et des zygomatiques.
Woody Allen nous présente le meilleur côté de New-York: il trouve des 'petites' rues, de petits magasins. Ce qui est sans doute presque de la manipulation d'images à la Soviétique en nous en montrant que le plus beau.
1) Les blagues de blondes. On retrouve un des stéréotypes du cinéma: la "Dizzie blonde".
Après un boxeur écervelé et déjà une pute dans ,entre autres, Maudite Aphrodite, on a droit à "Une Blonde plutôt écervelée"/"ein dummes Blondchen" (en apparence seulement car loin d'être stupide, elle est plutôt maladroite et naïve comme une Pierre Richard):
_Elle Fanning oublie même son nom sous le coup de l'émotion de rencontrer Diego Luna/Antonio Banderas bis.
_La première chose qu'elle dit à la Presse People est qu'elle avait été élue "Miss Sympathique" de son lycée.
_Elle croit que, comme son petit ami est très intelligent, qu'il ne s'entend pas avec sa maman et qu'il révise peu mais a quand même de très bonnes notes aux examens, c'est qu'il doit "donc être forcément un peu Asperger" (sic).
_Comme Richard Anconina dans Itinéraire (justement) d'un(e) enfant gâté(e), elle a toujours l'air surprise:
"Venez avec moi dans le sud de la France"
"Le Où de Quoi?"
Liev Schreiber qu'elle admire la veut alors comme muse. Il a joué Orson Welles et ressemble ici à Jean-Luc Godard avec ses lunettes de soleil et son polo sous sa veste deux boutons.
Quand Fanning rencontre ce Pygmalion, ses expressions corporelle et verbales rappellent Diane 'La-di-da, la-di-da' Keaton: experte aussi en 'awkwardness'.
J'ai aimé qu'à ses moments de tristesse, ce réalisateur marche seul dans les studios vides: Il aime se prendre pour Norma Desmond (l'actrice incomprise du Boulevard du crépuscule)."
_Elle croit que des objets vendus sur le trottoir à New-York lors d'un précédent séjour étaient des "soldes", des "affaires extraordinaires": des "Rolex et Birkin Bag" pas chers (nb.: le Birkin un "long sac haut, inventé chez Hermes après que Jane Birkin fasse la remarque en avion à leur désigner Jean Louis Dumas que ses sacs-à-main sont trop petits et laids pour les grandes bouteilles de son enfant Lou"...).
(En autres vraies marques 'placées' plus tard:
_ une autre escort-girl demandera à l'enfant riche si c'est vrai que ses copains de classe en école privée ont tous "des comptes ouverts au magasin Bergdorf et chez Prada"?)
_et quand elle demandera quel est ce vin (qu'elle boit comme du Coca-cola…), le Rudolph Valentino bis lui répond que c'est du Château Meyney.
_ils se donnent des rendez-vous et dorment dans les "hôtels" souvent mentionnées: The Pierre ou le Carlisle, mentionné encore plus de fois car elle le confond.
Un hasard sans doute car Woody Allen et son groupe jouent souvent dans son café depuis 1996...
2) Beaucoup d'autres name-droppings me donnent l'occasion de tant découvrir (ou me rappeler):
__"Allons voir les Weegees at the MOMA" est mentionné 4 ou 5 fois. J'ai confondu avec les Fugeees.... Arthur Fellig Weegee est un photographe Autrichien ...comme Arnold Schwarzenegger. (A ne pas confondre avec un Weegee board souvent vu dans films d'horreur pour parler aux morts ou un Weedgie souvent vu dans films d'ado pour écraser couilles en tirant ton slip).
__Notre héros a "besoin des musiques et chansons d'Irving Berlin" autant qu'une "cigarette et un verre".
__Sa copine pense qu'il rêve d'être "Sky Masterson", autre "amateur de jeux de hasard" dans la comédie musicale 'Guy&Dolls'.
__ 'Ma soeur m'a dit que c'était une fois devant les tableaux de Bosch que t'a pris très fort l'envie romantique de l'embrasser pour la première fois...Elle a alors deviné que ton psychiatre n'était pas le bon et marchait pas sur toi'. Pas très romantique car les tableaux de Jheronimus Bosch ont des horreurs et tortures...
__"Demande lui sa plus grande influence au sujet de l'amour, Denis de Rougemont ou José Y Gasset" (J'apprends encore plus sur l'amour):
"La passion amoureuse est une construction symbolique. Dans L’Amour et l’Occident, Denis de Rougemont (1906-1985) la présente comme une institution imaginaire forgée par les élites des XIIe et XIIIe siècles pour s’émanciper du carcan moral de plus en plus contraignant de l’Église. L’écrivain s’attache donc à déconstruire l’idée de la passion amoureuse." (merci un Romain Treffel.)
"L'amour se prolonge dans le temps: on n'aime pas selon une série d'instants subits, de points qui s'enflamment et s'éteignent comme l'étincelle, on aime l'aimé continûment" (José Ortega y Gasset, 1883-1955)
Au passage, bel hommage aux professeurs mais aussi à la curiosité:
(Sa copine est impressionnée par les références de son ami et lui demande son secret)
"Je lis, mais pas 'que' ce que me donnent les professeurs".
__Rapace/Greedy/Soif de Culture: Good Job!
On découvre que sa professeur en culture générale aura surtout été sa mère qui l'élève en Culture Vulture à la Whiplash: "elle m'a forcé à la dure au piano, à l'opéra, à lire "l'ennuyeux Henry James".
**3) Visuels, détails et code couleurs enivrants: **
__Entre autres détails, Rebecca Hall porte un énorme ciré tout jaune repéré sous la pluie par Jude Law qui arrive en voiture. Juste après, Chalamet boit du vermouth dans la boite de jazz et au mur sous la neige on voit arriver un taxi jaune.
(imdb m'apprends que la photographie est d'un Vittorio Storaro (Café Society/Wonder Wheel/Le dernier empereur/Ladyhawk/Apocalypse Now et des Dario Argento!)
((nb.: une remarque un peu 'people' et méchante au passage; est-ce ironique que ce soit Jude Law qui joue un cocu? Woody l'a t il choisi car il a comme moi lu que c'est plutôt souvent Jude Law qui trompe l'autre…))
**___Le 'J'accuse' de Woody contre ses riches, les journalistes et les trolls?
_Fortune familiale issue de l'esclavagisme mais bel hommage à une/sa maman:**
"Elle m'a surpris, en bien. Je me sens plus proche d'elle".
Sa mère vient de pourtant lui confier qu'elle a rencontré son père lors d'une passe dans un hôtel et (pire?) que ses économies de travailleuse-du-sexe ont catalysé toute la fortune du papa et de la petite famille.
Cette pute a été le Business Angel à qui ils doivent tous leur train de vie et fortune.
Sans vouloir "essentialiser" à son milieu New-Yorkais, je ne peux m'empêcher de voir là un message de Woody Allen. Son 'J'accuse mon (nouveau) milieu'.
Cette maman n'est pas si improbable ou incroyable que cela:
_Passé très crédible quand on connait un peu certains composant le Who's Who ou quand on effectue des visites guidées de "stately homes" en Angleterre où on croise dans le passé des familles actuelles ( bonnes gens contemporains très bien de nos jours), des ancêtres s'étant enrichis dans les pires immondes Affaires imaginables.(Enrichis un peu comme les Larrabee dans Sabrina de Billy Wilder.)
_Sans le même passé, cette excellente Cherry Jones jouant la maman guide et experte de culture, ex escort-girl rappelle l'intégré dans la haute société baronne Nadine de Rothschild guides et experte de savoir-vivre. Ex-Doublure de scènes de nu..
_Woody, "victime des médias", en profite au passage pour traiter aussi les médias de putes:
"J'ai exercé le plus vieux métier du monde".
"Tu as été journaliste?"
_Et s'il vanne les journalistes, il se paye aussi les trolls en la personne de "Troller": le camarade de classe rencontré sur le trottoir (aussi).
Un mélange de Tullius Détritus et du Devin dans Astérix: C'est une de mes scène favorites.
Allen se moque des langues-de-putes en la personne de ce pivert moqueur à forme humaine. Cet ancien camarade de classe ne répète que des fake-news salaces, macho, moqueuses, suffisantes...une boule puante humaine qui trouve que telle fille était "moche", l'autre "ressemblait à Yasser Arafat",
une autre fille "n'avait pas de seins, plate comme une table à repasser à moins que tu aimes le genre Grace Kelly" (sic),
qu'untel a raté son année(ce qui est faux mais il persiste même lorsque corrigé par le concerné lui même),
qu'un autre a volé mais "son riche papa a payé et le soutiendrait même s'il tuait dans la rue" (est-ce une allusion à Trump?),
et que Chalamet va sans doute se faire voler sa fiancée par le réalisateur connu.
Et ce Troll--er veut devenir médecin…
Je découvre à cette occasion l'excellent acteur Ben Warheit mais c'est hélas vraiment sa tête: il me rappelle ma découverte de Philip Seymour Hoffman dans le même genre de rôle arrogant dans Le Talentueux Mr. Ripley.
__Une remarque pour les vieillards comme moi: Selena Gomez ressemble à Séverine Ferrer, (trop?) oubliée de tous.
Goujat intello prétentieux ou trop exigeant?:
__Fanning dit avoir peu dormi à cause du bruit de la rue et des camions de pompier. Chalamet lui susurre alors:
"In the roaring traffic booom,
In the silence of my lonely rooom,
I think of yoou"
(Comme moi) elle ne reconnait pas de suite cette citation, cette nième allusions et références. Et pire, elle l'attribue même "à Shakespeare"...
Chalamet met alors fin à sa relation avec elle car c'est la goutte qui fait déborder le vase. Il la quitte. Elle ne s'en rend d'ailleurs même pas compte. Nième blague de blonde.
J'apprends que c'était de Sinatra dans la si belle chanson d'amour 'Night and day'.
(C'eût pu être pire: Seinfeld mettait lui fin à une relation car, à la fourchette, "elle mangeait ses petits pois un par un").
(à suivre)