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Je suis prof. Des films sur les profs, il en existe pléthore. A l'heure où 1 prof sur 2 démissionne (j'exagère à peine), je m'attends à un film qui attaque le vrai problème de notre chère Education Nationale (que l'on abrègera EN).

Que Gabriel Attal se rassure, ce film ne porte pas atteinte à son ministère.

Mais bon, c'est un film sur les profs avant tout, et pas sur le système. On veut nous faire comprendre que ce sont aussi des humains, ils ont des émotions et une vie à côté de leur boulot (si, si, c'est possible).

A travers les différents personnages remarquablement incarnés par François Cluzet, Vincent Lacoste, Louise Bourgoin et j'en passe, toute une petite ribambelle de profils sont dépeints. On a la prof cool, qui semble cocher toutes les cases de la bonne prof puisqu'elle tient ses classes et tisse du lien avec ses élèves. Le vieux prof, proche de la retraite, qui se fait chier et qui fait chier ses élèves. La prof dépassée, manquant d'autorité envers ses élèves mais avant tout envers son propre fils. Et puis il y a Benjamin, le prof contractuel recruté comme remplaçant, qui dès son premier jour est littéralement balancé devant une classe.

Rien que pour cette première scène, le début est plutôt réaliste : désormais les profs contractuels sont recrutés en 30 min (coucou la région Parisienne) et n'ont aucune formation. Ils se retrouvent donc face à 30 gamins qui n'ont qu'une envie : tester les limites de cet adulte qui se présente à eux comme le fait n'importe quel gamin. Dommage, ici on a décidé de ne pas nous montrer à quel point un prof débutant (formé ou non) peut galérer. Non parce que les scènes où l'on voit Benjamin en difficulté pour avoir le silence dans son cours ne sont absolument pas réalistes. Gérer une classe, ça ne se règle pas en une semaine. Pourtant, c'est l'impression qu'on nous donne.

Le film est traité de manière très superficielle et n'aborde pas les réelles problématiques de l'EN. Tout du moins, il essaye mais ça manque de réalisme. On aborde les mutations mais on ne vous dit pas que quand on débute, on est envoyé loin de chez nous et qu'on doit attendre des années avant de pouvoir rentrer. Pour certaines disciplines, c'est impossible car les régions coûtent trop chères en points. On n'aborde absolument pas la surcharge du nombre d'élèves par classe, la difficulté à gérer l'hétérogénéité de niveaux et les élèves en situation de handicap. On ne nous dit pas que beaucoup de profs travaillent dans plusieurs établissements, parfois trois en même temps et à quel point c'est épuisant. On ne nous montre pas le manque de reconnaissance de la société, de la direction, des parents, des élèves. Aucun mot sur la surcharge de travail. On ne dit rien sur le manque de budget, les ordi encore sous windows 95, la photocopieuse qui ne marche jamais en salle des profs, la messagerie professionnelle qui n'a pas été actualisée depuis les années 80, les établissements qui tombent littéralement en ruine, le manque de profs tout court parce que pour toutes les raisons que je viens de citer plus personne ne veut faire ce métier (ou tout le monde se barre).

Enfin, si, pour certaines situations que je viens de citer, le film nous offre parfois une scène qui aborde le problème... ça dure trois minutes et on passe à autre chose. Donc ça n'apporte rien du tout.

En fait, le gros problème de ce film, c'est qu'il n'est pas politique. Où est le point de vue de l'auteur ? C'est trop lisse, trop gentil. Ce film veut plaire à tout le monde, mais il déplait aux principaux concernés. Quel gâchis alors que beaucoup de scènes ouvrent le débat sur des sujets intéressants qui sont vite enterrés. On passe à autre chose parce qu'il faut que le film fasse 1H40. Alors pourquoi en avoir fait un film ? -enfin, un film filmé de la manière la plus banale possible qui ne révolutionnera pas le cinéma.- Le format d'une mini série aurait été bien plus porteur et chacune des problématiques auraient pu être développées correctement.

La réalisation, par ses plans larges et fixes, empêche de ressentir de l'empathie pour ces profs. Je pense à une scène avec la prof de sciences qui parle dans le vide car les élèves n'écoutent rien : on ne nous montre pas ce qu'un prof peut ressentir dans un moment pareil.

Quand on veut faire un film sur le métier de prof, on va voir des profs. Mis à part la vidéo éduscol qui préconise de mettre deux doigts sur la table pour faire taire les élèves, la plupart des situations sont mal documentées et cela créer un décalage avec la réalité du métier (exemple : le chef d'établissement qui remet en main propre la réponse de mutation, ça n'existe pas).

Je ne m'attarde pas sur certaines situations qui ne servent à rien telles que l'histoire d'amour entre les profs d'EPS et le baiser entre Benjamin et Meriem sorti de nul part.

En somme, quel est l'intérêt de ce film ?

Je finirais tout de même par les quelques points positifs, car il y en a. Mention spéciale au réalisme de l'attitude des élèves, le passage du tuto éduscol avec le prof qui met les doigts sur la table (cette vidéo existe vraiment) et la scène de l'alarme incendie où personne ne sait quoi faire. Et bien sûr, le jeu des acteurs.

sweet-burger
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le 17 sept. 2023

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