Un million clefs en main par Alligator
Vu lorsque j'étais jeune cinéphile, à l'époque où la télé publique diffusait de vieux films tous les vendredis soirs au "Ciné-club" ou tous les dimanches soirs au "Cinéma de minuit". De nos jours l'offre privée est bien plus généreuse, mais par essence destinée à des privilégiés.
Et je n'avais pour souvenir que la galère continue que subissait un Cary Grant éreinté par le projet fou de faire bâtir une maison. Le sujet est on ne peut plus simple en effet : les emmerdes des nouveaux propriétaires.
Le comique vient essentiellement de ces situations dans lesquelles le couple Grant/Loy va se foutre tout le long du film en raison de leur ingénuité.
En miroir, Melvyn Douglas, leur avocat et ami, est le témoin rigolard mais un brin dépité de ce gouffre à pognon que constitue pour les deux new-yorkais naïfs la construction d'une bicoque dans le Connecticut voisin.
Tout repose sur ce problème a priori. Dans les faits, c'est surtout Cary Grant et ses mimiques décomposées qui font le boulot. Il tient le film sur les épaules.
Quelques dialogues très fins, à double sens, ironiques sont par moments désopilants et montrent le sens de l'humour nécessaire au couple pour faire face à l'adversité.
Malheureusement, le rythme du film dirigé par H.C. Potter est parfois un poil assoupi. Le cinéaste se contente souvent de filmer de longs plans séquences illustrant les déboires quotidiens de la petite famille. Rien d'extraordinaire pour s'émoustiller l'oeil.
D'autre part, j'ai connu une Myrna Loy plus mordante.
Mais Cary Grant est comme toujours excellent. Je le répète, le rythme n'est pas affolant (pas de screw-ball comedy ici) et malgré cela, l'acteur parvient à soutirer du texte et des situations un vrai comique, de trogne, de mimique, tout en n'en faisant jamais trop. Juste, précis, imparable. C'est dans ces moments là qu'on mesure le talent incroyable du bonhomme. Etre capable de faire rire avec un scénario somme toute banal, rectiligne, chapeau l'artiste!