Sous la bannière libertaire & démocratique, gauche de pleurniche [sociale], déconstruction & ethniqu

(Extraits car le texte original est trop long - je dépasse probablement le cadre du film ; promis, j'éviterais ce genre de démonstration militante à l'avenir - ou du moins de les aborder avec 'ouverture d'esprit')


Tentative d’hypnose pseudo-documentaire à défaut de véritable bible de la révolution anticipée, où on voit des confrontations entre Gilets Jaunes et policiers ou autres forces de l’ordre ; parfois sanglantes ou dignes d’heures sombres voire de régimes au Sud de l’équateur, incapables de mater proprement leurs foules énervées. Pour le reste, c’est de la gaudriole à la jonction d’intellos ampoulés, de maternantes criardes, d’agités ou défavorisés employant maladroitement leur langue de naissance (ce film aurait-il intérêt à cacher les génies vulgaires ou simplement la gouaille ordinaire de Gilets Jaunes incontrôlables ?) et de gauchisme vain.


D’une part il est salutaire en dénonçant indirectement cette ‘tarte à la crème’ de la condamnation de la violence et les appels à se désolidariser des manifestants dès que des mouvements politisés ont ‘débordé’ dans la rue. Il apporte une once de recul sur notre réalité française sur le temps long (la Police Nationale est un autre de ces vestiges de Vichy et une particularité française !) et sur le présent (les médias complaisants n’ont pas relevée la condamnation par l’ONU et Michelle Bachelet des excès de la répression du mouvement par le gouvernement Philippe/Macron). De même, ce Pays de Dufresne a le mérite au moins formel de ne pas s’attarder sur le jeu politicien et ne montrer aucun personnage en-dehors de Macron et des hauts fonctionnaires de police ou du gouvernement ; mais à cette occasion il devient le seul intermédiaire à la place des Mélenchon, des étiquetés ‘complotistes’, des ‘dissidents’ ou agitateurs. Et cet intermédiaire se compose d’un panel d’apparents mollassons ou de professeurs de la parole et de la [systématisation] pensée subversive – avec pour lien de fond, une gamme étroite de combats, propres aux sympathisants ou clients naturels de LFI et des Indigénistes.


Malgré son aspect assertif, ce film livre une vision à la fois aseptisée, simpliste et cajoleuse ; des assertions minimales et banales, aucune revendication précise ! Il ne vomit que du théorique (et des références) ; veut produire son narratif et ses experts (certains pourraient facilement prendre leurs distances à l’avenir ! Notamment si les Gilets Jaunes redécollent au mépris de leurs accompagnants gauchisants) s’ébattant dans un cadre stérile et cadenassé, avec des thèmes et des mots interpellants. En-dehors des vidéos et des métiers des intervenants au générique de fin : pas de concret, pas d’Histoire, des idées à leur minimum. On évoque la Révolution de 1789 pour se contenter de chatouiller le supposé instinct « insurrectionnel » acquis depuis par les français. On ne dresse aucune filiation du côté adverse, si peu défini qu’à ce stade il n’est même pas ‘essentialisable’. Le pire, qu’apparemment le public est trop imbécile pour réaliser alors que la chose est flagrante et odieuse, c’est que les protagonistes ne sont présents qu’en temps que chair à canon !


(...)


À l’instar d’une certaine ‘réaction’ [droitière] qui s’échine à refléter ce qu’elle exècre (ou jalouse ?), ce documentaire d’une autre souche ressemble, par ses manières, à une œuvre ‘establishment’ médiocre au bénéfice d’un establishment de substitution, en train de se chercher, mais tenant déjà ses cibles, son héroïsme, son idéal moisi mais ‘imprenable’ (comme le sont ceux de la méritocratie ou de l’intérêt commun) et son intelligentsia diarrhéique (qui pourra peupler les podscasts d’information populaire, lesquels naturellement n’auront rien à envier à ces odieux plateaux télé où ne défilaient que des crétins bilieux et des menteurs !). Aux meneurs et prescripteurs avec un programme naturel et profond pour le pays comme Bouhafs et Bantigny de remplir cette belle forme soit-disant ‘vide’ que sera la démocratie promise, réelle et directe (à moins que les aspirations ‘open source’ du Parti Pirate dont le réalisateur est membre ne soient qu’un marche-pied pour des mouvements moins ouverts que décidés ?).


À aucun moment le film ne s’intéresse à ceux pour lesquels il prétend exister. Comme toute saloperie politique, il aime son peuple à bout de nerfs, en larmes, furieux et démuni. Il aime nous le montrer cassé et ne laisser de porte ouverte à aucune solution, aucun dépassement, même très partiel ; il n’y en a que pour la cause légale et institutionnelle. Quand le peuple s’exprime ici c’est pour paraître dans ses moments de faiblesse, sinon carrément enfoncé dans ses schémas crétins que nos activistes férus de sociologie ne semblent pas remarquer.


(...)


Il y a des gueules cassées ; il y a aussi la posture de l’outragé.e, l’insignifiante vexation transformée en tragédie. Au milieu de ces femmes qui perdent un œil et de ces hommes qui passeront quelques années le visage troué, on se coltine le grotesque de ces gens qui tendent la joue, non pour tendre l’autre mais pour crier ‘regardez ! Il m’attaque ! Aaah j’ai mal putain ! C’est hors-la-loi !’ et devenir la personnification d’une injustice. Le comble est cette fille aux prises avec un maton ‘civil’ en train de demander à l’agresseur son numéro de matricule et revendiquer l’injure « Connasse » comme stigmate de son agression et preuve de la situation très grave dans laquelle la démocratie est enlisée ! C’est l’occasion de s’intéresser à ces recrues annexes.. ce sera celle de rappeler l’affaire Benalla, escort boy du président et ratonneur sous protection pendant ses heures de loisir. Le film pourrait alors rebondir sur les privilèges et les passe-droits – mais il ne faut surtout rien pointer de trop compromettant, ni afficher quoi que ce soit d’un peu neuf. Nous aurons un passage sur l’état d’urgence devenu loi ordinaire ; que du vent et rapidement. Ce film n’est là que pour compiler des aberrations que tout le monde a pu observer ; dans l’absolu comme vu ‘de gauche’ c’est misérable. La société de caste en France ou celle de surveillance ici comme à l’échelle globale, les montées de violences enregistrées, même les basiques de la critique du capitalisme ne sont pas là ou qu’en version grasse pour la mégère et l’étudiant frustrés d’être logés parmi le tout-venant. Ne serait-ce que sur la violence institutionnelle, son prétexte, le film est quasiment nul ; il ne sait rien nous dire d’éventuelles brutalités policières au quotidien, d’oppressions structurelles pourtant abondamment invoquées mais jamais explicitées – il ne prête son écran qu’à ce qui a déjà abondé sur les autres et s’y réduit (c’est sa part ‘cinéma’ et sa critique intégrée de la ‘société du spectacle’ certainement – comme c’est fin, comme c’est évolué ! Gouttez abondamment !). Le comble c’est que pour la fameuse convergence des luttes aussi le film est faible [en arguments].


(...)


Les citations classiques de la sociologie et de la philosophie politique se multiplient et sont toujours dispensables au mieux ; d’où sort ce besoin de recourir à Hannah Arendt pour nous annoncer qu’un pouvoir sans légitimité n’est qu’un pouvoir légal !? Au milieu on embraye sur les morts fameuses pendant des opérations de police ces dernières années, puis c’est reparti pour un tour d’eau tiède. Le film est incapable de faire tenir debout la moindre proposition, la moindre ambition sérieuse à une près pour le moins socialiste (‘à bas l’état policier, vive l’état social’), ne sait que bavasser et faire disserter ses intervenants désespérants.


(...)


C’est triste sinon tragique qu’un sosie d’Enthoven amène les propos les plus forts et éclairants : au terme d’un commentaire éreintant de grotesque devant une scène qu’on vient également de regarder, ce Jobard relève que les manifestants ne cèdent à une violence apparemment immodérée (en les poursuivant rageusement) que lorsque les flics fuient à moto. D’après lui chacun se satisferait du maintien de la violence légitime dans des mains exclusives – et officielles. Voilà effectivement ce que bon nombre de contestataires feraient bien d’examiner – sauf naturellement s’ils tiennent à poursuivre leur comédie. Et notre France a besoin de renouveler son animation socio-culturelle ! Si en plus cela peut amuser certains, apporter à toutes sortes de personnes diverses sortes de frissons et occuper les réseaux sociaux à des indignations un peu plus dignes et fondées ; allons-y ! Soyez les clowns dont un pouvoir moralement épuisé a besoin pour paraître utile ! Il n’y a en vérité que deux possibilités positives pour ces mouvements sociaux : soit ils rompent avec ce qu’ils détestent et créent d’eux-mêmes une alternative ; soit ils arrêtent de prêter le flan à ces pleurnicheries en guise de prétendus dialogues et ils réalisent au moins la première étape de leur révolution en devenant un peu plus méchants.


(...)


Alors soyons un peu rigoureux ou simplement sérieux ; demandons-nous à quoi servent tous les efforts de ces gens assimilés par le film aux Gilets Jaunes (et pour une part effectivement issus de leurs troupes) !? S’il s’agit de réclamer davantage de l’état, plus de démocratie, plus de soins, plus d’argent, c’est une lutte ordinaire et vous pouvez passer par la voie classique avec les syndicats, les leaders et partis de gauche ; ce ne sera pas la panacée, mais ça pourra s’avérer efficace. Et en fin de compte, c’est tout ce que veulent les individus présents ! Si la motivation est un affaiblissement de l’état et de la centralisation, un coup d’arrêt aux escroqueries écologiques et à la fiscalité confiscatoire, alors il y a de quoi rire ! Fuyez braves idéalistes ou candides forcenés, ce film est aux antipodes et entérine la récupération des Gilets Jaunes par le camp classique de la ‘contestation sociale’ et par la gauche. Bien sûr, si c’est pour la révolution que les Gilets Jaunes ont fait naître en vous un espoir ou simplement un soulagement (celui de voir du ‘gaulois réfractaire’ dans une nation dont l’illustre insoumission semble passée de mode – si elle n’est pas carrément un fantasme entretenu depuis la proclamation des Droits de l’Homme), forcément ce que le film donne à en voir et son parti-pris ‘anti-répression’ ne saurait suffire. Enfin si c’est pour recomposer la France et se désaliéner, égoïstement, collectivement, les deux ; changer de club et d’espace ; ici c’est pas le sujet ; on ne se soucie pas de prendre de pouvoir ; on essaie au mieux de le ‘reprendre’ (et d’ailleurs le pouvoir ‘nous traverse tous’ c’est bien connu ! – donc si on cotise financièrement ou idéologiquement il devrait nous revenir !) via une démocratie non ‘flawed’ (ce qu’elle est devenue en 2014 dans les classements internationaux). Forcément si vos rêves se font sans AG et conseils d’administration ouverts au public (le tout piloté par des ‘sages’ dévoués naturellement ! – ce sont des progressistes, pas des sauvages !), vous êtes autant un étranger devant ce film qu’un Gilet Jaune ou sympathisant l’est face aux dirigeants et influents de ce pays.


Ce film a des sympathies et une clientèle, mais il est, peut-être par tactique, ‘idéologiquement’ paresseux – suprêmement paresseux d’ailleurs : il est du côté du peuple, il aurait donc tout coché ! Or c’est toujours la même chose avec ce genre d’activistes : ils ne vont pas créer ou réinventer l’existant, ou seulement en réaction ; ils se soucient moins d’enrichissement que de catalyser les colères, les espoirs, les mouvements. Et en tête de cortège, la victimisation ; de la niaiserie et de l’inaptitude qui se sentent vernies. Ce film a dû être conçu dans un tel état de ravissement et de certitude qu’il laisse souligner ses manquements sans se sentir concerné ; car la spécialiste du droit affirme « la démocratie c’est le dissensus » en opposition au consensus qui serait nécessairement un accident, sous-entendant que c’est la preuve d’un contrôle ou d’une oppression. Or, où sont les revendications particulières et contradictoires ? Nulle part, ou planquées – au profit de quoi ? À quoi sommes-nous censés collaborer en nous rangeant derrière cette bannière à la fois rageuse et nébuleuse ? Certainement à l’antiracisme et à la déconstruction, d’après le parcours et les préoccupations des personnalités publiques mises à contribution – égalitarisme oblige (invoquons donc aussi le droit de garder ses convictions privées ! La pudeur !), on se garde d’en parler ! Quelque soit les aspirations unifiant ou titillant cette garde, le film s’inscrit dans cette vision ‘Nous/Vous’ contre ‘Eux/Vendus’ (même s’il ne nomme personne – c’est une vertu de sa prudence et de sa confiance douillette en sa position) ; il ne concède que des éruptions lyriques ou de petites nuances qu’apportent ponctuellement et parfois lâchement certains intervenants (dans la seconde moitié essentiellement) ; ne sait pas s’en saisir, laisse ça traîner. C’est exactement comme lorsqu’on organise des débats, sait qui est là, qui compte et surtout ce qui doit en sortir ou être entendu ; et qu’on laisse quelques décalés néanmoins ralliés à la famille apporter leur petite touche, qui de toutes façons va s’évanouir dans le paquet.


Damasio cite Jean Genêt, la violence comme éclosion : excellent ! Or d’autres violences et d’autres appétits existent que les tiens – ou ceux du peuple dans lesquels apparemment nous sommes tous impliqués et en train de nous reconnaître ! Imaginons que le pouvoir ait un plan vital et défini (peut-être même à long-terme), contrairement au tien ; en quoi tes poussées et ta brutalité seraient plus légitimes ? Tout au plus elles seront plus romantiques, car des outsiders ou un individu en colère sont naturellement plus irrationnels et téméraires qu’une machine en train de produire de l’insurrection ou un bouleversement social. Au regard du projet visionnaire ou routinier d’une élite aux commandes (qui pourrait être moralement apathique, mais aussi se soucier du développement et du contentement de ses sujets !), ce ne pourrait être qu’une gesticulation de morpions entravant un plan bien plus grand qu’elles ; la violence à l’égard de ces ignorants [réactionnaires, paysans ou masses crétines] ou ‘résignés-réclamants’ [formule d’Attali] serait légitime, ou même une belle démonstration de la marche d’un quelconque progrès en dépit des obstacles posés par les confus ou arriérés – ou simplement les petits dont les mauvais sorts sont évidemment regrettables, mais qui ne savent voir au-delà de leur cas, ni au-delà de la misère et des ‘effets secondaires’ – ni même apprécier leurs chances voire leur bonheur actuels – dont un zeste de déni démocratique et de coups de matraque dans la gueule assureront le maintien.


(...)


Son sommet dialectique est la création de contradictions artificielles entre un intervenant parlant de prévention dans la démocratie au lieu de sanction, avant une scène évoquant la politique « préventive » de Poutine versus celle « répressive » de Macron. Or il s’agit de traitement des manifestants, arrêtés avant de se déployer en Russie, alors que la précédente intervention était un plaidoyer pour l’horizon démocratique (dans l’idée que la démocratie commence avant le choix du bulletin). Ce genre de petits tours même pas malin est tout ce dont le film est capable, avec cette tentative moisie d’enfoncer les rares représentants policiers autorisés ou motivés à participer, là encore avec des enchaînements à la fois très lourds et stériles – comment peut-on valser sur des terrains si juteux et à ce point manquer de jus !?!


Toute le texte (trop long) :
https://zogarok.wordpress.com/2020/12/04/un-pays-qui-se-tient-sage/

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le 4 déc. 2020

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Zogarok

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