Ce qui est embêtant, avec les "chefs d'œuvre" (c'est la critique unanime), c'est qu'on est toujours déçu. On s'attend quand même à un film indépassable, à l'absolu, ce qui n'est pas le cas. Mais on est toujours satisfait, car l'on vient de voir un film magistral.
C'est donc ça la prison, ce stress, cette attente, cette inhumanité, cette tristesse, cette lutte de pouvoirs, ces clans, cette noirceur, ce trafic, cette fumée, ces cigarettes, cette corruption, cet abattement ... On y est, on est plongé dedans, le cœur palpite, on est enfermé nous aussi. On goûte pareil aux rayons de soleil, aux sorties. L'émotion est là, palpable, d'un rendu magnifique, réel. C'est là la vraie force de ce film, c'est d'être un morceau de réalité, mais romancée, magnifiée, c'est d'aller au delà de la vérité, c'est d'être une œuvre ancrée dans le réel mais de le dépasser.
Et puis le jeu d'acteurs est impressionnant. Tous sont convaincants. Évidemment Tahar Rahim, une vraie "gueule", bien sûr, il est au delà du simple de jeu, on imagine pas un seul instant qu'il quitte son rôle, sa vie en quelque sorte. Il sera étrange de le voir dans d'autres films. Le parrain corse est beau, dans sa méchanceté, sa conviction d'être le patron et sa lucidité sur son pouvoir si chancelant. On est dans de l'interprétation de haut vol.
Alors que manque-t-il ? Peut être un soupçon de lyrisme, de folie, pour quitter un peu cette véracité et s'échapper vers plus de romanesque. La nervosité est là, il aurait fallu une envolée, un moment d'anthologie, la scène, le moment décisif, celui qui reste dans les mémoires. Il n'y en à pas, mais il y a un film de grand talent, un vrai bon film. Un film, tout simplement.