Si votre fantasme ultime est de découvrir Reese Witherspoon se transformer en feuille de laitue pour voler autour d'une Oprah Winfrey en mode Kaiju drag-queen, si vous avez déjà rêvé de voir un médium sosie de Zack Galifianakis faire du yoga sur des morceaux d'ambres géants ou encore si vous pensez que vibrer sur la fréquence de l'amuuuur va vous faire voyager aux quatre coins de l'univers, vous avez frappé à la bonne porte (mais genre carrément !) avec cette adaptation aussi hallucinée qu'hallucinante du roman de Madeleine L'Engle !
Déjà porté sur le petit écran en 2003, ce croisement improbable entre "Le Magicien d'Oz" et "Interstellar" à destination d'un jeune public avait sans doute le potentiel pour être un des ces rares projets originaux des studios Disney synonymes de bonnes surprises, un peu dans la lignée de l'excellent "À la Poursuite de Demain", sauf qu'à l'arrivée, le film d'Ava DuVernay tient plus du trip sous LSD cinématographique de l'année que du conte magique ensorcelant...


Jeune adolescente brillante à la vie lycéenne difficile, Meg ne se remet pas de la disparition inexplicable de son scientifique de père voilà plusieurs années. Heureusement pour elle, son petit frère surdoué lui fait alors rencontrer trois incarnations divino-célestes maquillées comme des voitures volées (Mesdemoiselles Quidam, Quiproquo et Qui, respectivement incarnées par Oprah Winfrey, Reese Witherspoon et Mindy Kaling, la dernière étant la seule à tirer son épingle du jeu pour son premier rôle d'importance sur grand écran) qui lui apprennent que son père a trouvé le moyen de se téléporter par l'esprit aux confins de l'univers et qu'il s'y est retrouvé coincé comme une andouille depuis tout ce temps. Une fois cette situation complètement absurde acceptée, Meg, son futur petit copain (également obsédé maladif des cheveux) et son jeune frère mettent leurs esprits sur vibreur et partent évidemment à sa recherche...


À moins d'avoir le cerveau déjà rongé par tous les acides existants, préparez-vous à vivre une expérience au-delà même des notions même de génie et de nullité (il est même très difficile de mettre une note à ce truc) où vous serez fascinés, réellement bouche bée devant un film qui ne cesse de repousser les limites du n'importe quoi dans une mélasse de mièvrerie et de mauvais goût confinant quelque part au génie.
Rationnellement, "Un Raccourci dans le temps" est un désastre narratif : les enfants aux conditions très caricaturales nous sont introduits de la manière la plus plate possible (il est très dur de s'attacher un tant soit peu à eux) avant d'être pris dans un enchaînement de péripéties sans queue ni tête et donnant l'impression de n'être juste là que pour faire la part belle à des effets spéciaux discutables. Pas le temps de souffler dans ce "Meg et ses copains au Pays des Merveilles" version SF, on passe d'une séquence à une autre à toute berzingue avec des univers totalement différents, parfois amusants, souvent consternants mais dont l'empilement improbable crée une espèce de sidération constante qui ne cesse de nous faire demander jusqu'où va bien pouvoir encore aller ce chaos esthétique et naïvement métaphorique auquel on assiste. Pas avare en discours positifs sous-jacents (l'amour comme point de liaison ultime, l'affirmation de soi, l'éloignement d'un parent proche et les remontrances qui en découlent...) avec des résonances plus actuelles (le métissage et le féminisme grâce aux actrices choisies) que le livre d'origine, "Un raccourci dans le temps" peine à en imposer une quelconque marque durable tant tous les choix esthétiques et narratifs pour nous les transmettre semblent toujours se tromper de route dans une apparente complexité masquant en réalité un énième et très banal combat du bien contre le mal. Ce n'est d'ailleurs pas la bande-son calibrée en mode cuillerées de sirop bien collantes et aléatoirement balancée pour surligner chaque instant artificiel d'émotion qui sauvera cette affaire du niveau zéro de passion de la part du spectateur qu'elle engendre.


Trop complexe pour les enfants (voire même un peu flippant avec la scène de la fausse banlieue ou le décor du combat final), trop barré et niais pour les parents, trop affreux pour à peu près tout le monde, "Un Raccourci dans le temps" n'est reste pas moins une plantade Disney réellement fascinante par sa propension étonnante à repousser en permanence les frontières du n'importe quoi de la manière la plus inattendue possible. On vous le conseillerait presque. Vraiment.

RedArrow
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le 25 mars 2018

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RedArrow

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