Under the Silver Lake est à la fois, pour moi, le polar le plus étincelant, le plus original, et le plus captivant de l'année !
On est plongé et promené dans un L.A. à l'ambiance froide et malsaine, superbement maîtrisée. Une atmosphère complètement en décalage avec l'aspect caniculaire et festif du cadre, ce qui l'a rend encore plus fascinante. J'avais déjà été particulièrement émerveillé par le travail sur l'ambiance dans It Follows, du même réalisateur. Et ce nouveau film confirme son talent pour apporter une atmosphère particulièrement glauque à un cadre estival.
Le film est l'une des plus grosse claque esthétique que j'ai prises cette année. Même si le mot "caresse" serait plus adapté que le mot "claque". Les décors sont riches d'une multitude de détails, le jeux sur les couleurs et la lumière est éblouissant, et le film possède une vraie imagerie marquée, notamment autour du look des personnages. Je peux prendre pour exemple cette fille constamment accompagnée d'au moins un ballon de baudruche, et coiffé de deux étranges macarons, ce qui apporte un vrai cachet au personnage avec peu d'éléments.
La bande originale composée est envoutante et par moment angoissante. Elle m'a beaucoup fait pensé, dans son style, à certaines b.o. de vieux polars, qu'on pouvait trouver notamment chez Hitchcock.
Donc pour ce qui est de l'emballage, c'est vraiment du grand cinéma pour moi. Mais le fond pourra dérouter beaucoup de personnes. En ce qui me concerne, il m'a vraiment séduit !
L'enjeu est de savoir si Sam (très bien joué par Andrew Garfield dans son côté flippé et paumé) se perd dans un délire totalement paranoïaque, ou touche réellement du doigt un étrange complot qui cache des secrets macabres de la ville et de la pop culture. Au cours de cette enquête, il découvrira (ou s'imaginera) des faits particulièrement effrayants et vertigineux, aussi bien pour lui que pour nous. L'apothéose du film dans ce sens est la scène magistrale du compositeur.
Et cette enquête est passionnante, car le film se renouvelle suffisamment, et a tellement d'idées, que l'on se prête au jeu à la fois avec un vrai investissement, mais aussi avec une certaine retenue, car tout semble surréaliste, et créé de toute pièce par l'esprit perturbé et obsessionnel de ce bon vieux Sam. L'intérêt que l'on porte au récit a donc une dimension plus élaborée que la moyenne des thrillers car on est fasciné à la fois par l'enquête, mais également par ce personnage qu'on soupçonne de nous escroquer involontairement en nous emmenant dans son délire absurde.
En suivant un personnage complètement paumé, le film traite alors de la vanité de vivre sans ambition, sans but à poursuivre, ce qui peut rendre dingue. Et la résolution de l'enquête, inventée ou pas par Sam, est parfaitement en accord avec cette idée.
Ce polar dépeint également un portait extrêmement flippant de la technologie avancée, créatrice de la paranoïa moderne, dont Sam est victime. La scène du drone et de la femme en pleurs est fascinante à ce niveau là, en plus d'être incroyablement belle dans la composition du plan.
Le seul point que je regrette un peu dans Under the Silver Lake, est la mise en place très pudique et assez peu marquante de la relation Sam/Sarah au début. C'est un parti pris volontaire pour souligner l'obsession irrationnelle de Sam, mais sa quête aurait pour moi était encore plus puissante si une relation plus mignonne s'était installée entre eux avant.
Il y a aussi ce plan dégueulasse d'une grosse merde de Jésus, que je ne comprends pas... Mais ça reste le seul moment en 2h20 où l'on regarde de la merde.