"Chaque détail prend de la valeur quand plus rien n’a de sens"

Citation de Frédéric Beigbeder


En soi, faire un film de policier, c’est pas bien compliqué : des flics cherchent un tueur et petit à petit à coup d’indice jusqu’à finir par trouver le coupable souvent déjà introduit précédemment (d’une manière ou d’une autre). Bon d’accord je grossis le trait mais il faut bien comprendre que ce statut va plus ou moins changer avec l’arrivée d’un tout petit film : Seven. S’il n’est pas le précurseur de cette idée de changement, c’est bien celui qui va donner une nouvelle façon de percevoir le policier, qu’une grande partie va suivre aveuglément au point d’avoir des traces inconscientes de son héritage dans des œuvres comme Death Note. Avec Fincher, le policier n’est plus un symbole de justice, on fait de lui un simple être humain qui va devoir faire face à un autre être humain. Bien plus qu’une démocratisation, Seven s’est révélé être une référence dont on temps plus ou moins pour servir au mieux notre histoire. "Une affaire de détails" s’inscrit dans une forme d’héritage la plus pure de Seven et plus généralement des films policier des années 1990.


De ce fait, on peut se demander pourquoi et comment le film peine à suivre même le niveau moyen des films policier de notre ère alors qu’il tente de suivre à la lettre les codes de l’âge d’or du thriller. On commence à trouver des indices avec la présence Jonh Lee Hancock à la réalisation mais aussi au scénario qu’on retrouvait au scénario des films de Clint Eastwood "Un monde parfait" et "Minuit dans le jardin du bien et du mal"...il y a 25 ans. Depuis il s’est surtout illustré en tant que YesMan assez moyen dans plusieurs films assez différents. Il est donc simple d’imaginer comment il a composé "Une affaire de détails", il a pris Seven et en a pris la base, pour ensuite les coller à son propre film. Ce qui peut sembler peu idiot (rapide et efficace) sur le papier va se révéler comme un soucis majeur du film, séparant ce qui est pris à Seven et qui ne marche pas, et ce qui est inventé et qui ne marche pas.


Mais avant tout, il serait hypocrite de ne pas reconnaître le talent de ses acteurs, notamment de Jared Leto qui est dans son élément de prédilection et qui profite d’une direction d’acteur hasardeuse pour se donner à fond dans un personnage qu’il perfectionne depuis longtemps. Mais même si tout le monde a beau jouer extrêmement bien, ou sont les relations entre les personnages. Je sais que la comparaison va faire mal mais il faut s’y attendre quand on s’approprie l’héritage. Dans Seven on prend beaucoup de temps à se rapprocher des personnages avec plusieurs dialogues allant plus ou moins loin dans leur intimité pour les rendre humain, les désacraliser de leur rôle de flics. Et c’est ce qui manque cruellement à "Une affaire de détails", on a des personnages sombres avec un passé douloureux mais dont on ne nous donne jamais les moyens d’éprouver de l’empathie. Et c’est également le cas pour Rami Malek qui n’arrive jamais à sortir du rôle de flic sérieux et qui n’arrive pas à donner de crédibilité à l’importance de sa famille qu’on nous montre sans jamais essayer de nous la faire aimer. La scène ou il est dehors, laissant sa famille dormir et d’ailleurs très parlant quand au fait que les personnes ayant bossés sur ce film n’ont pas compris Seven. Alors oui, il n’y a en soit pas de problèmes à dériver de l’œuvre dont on s’inspire, mais dans ce cas là vous êtes obligés de faire plusieurs ajustement sur ce que vous prenez, car innover c’est bien mais là les deux cotés rentre en contradiction, il suffit de voir la synergie entre les personnages entre les personnages pour s’en rendre compte.


Et je n’ai même pas encore parler de l’enquête, qui doit constituer le cœur de l’intrigue et qui est...inexistante. Les flics arrivent constater un cadavre et reparte et ainsi de suite, le mystère reste entier. Et je ne vous parle pas d’un Memories of Murder ou l’enquête n’avance pas mais bien d’inspecteur complètement passif à l’enquête, à croire qu’il se fiche contrairement, et les indices qui mènent à Albert n’ont juste aucun sens. Ce qui est idiot quand toute l’histoire se repose dessus (l’idée n’était pas d’être sûr à 100 % mais suffisamment crédible pour qu’on y croit un peu). Donc quand Jim et Joe tue Albert, on s’en fiche un peu, c’est juste deux flics qui ont raté leur mission sans trop grosse répercutions car après tout "Bon bah la police parfois elle se trompe". Une conclusion juste stupide quand on dispose de tels acteurs.
Je cale ça là mais la VF est vraiment horrible (et c’est un fan de VF qui parle) donc si vous voulez le voir, optez plus pour une VOSTFR.



“Dieu n'entre pas dans les détails ! Les détails, il les abandonne à
la créature, pour que la demi-liberté de l'homme trouve à s'employer.”



Citation de Vladimir Jankélévitch

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le 12 mai 2021

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Lordlyonor

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