Le Miroir
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le 17 mai 2019
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Avoir réalisé deux long-métrages à l’âge de 32 ans, chacun sélectionné à Cannes, augure un avenir radieux. Il y a fort à parier que le jeune Balagov, disciple de Sokourov, obtiendra bientôt la palme d’or, lui qui repart déjà avec le prestigieux prix de la mise en scène dans la section « Un certain regard » pour Une grande fille.
D’emblée l’image stupéfie : l’usage de filtre de couleur (rappelant le cinéma de Kieślowski, comme La double vie de Véronique), le cadrage, la photographie signée la très jeune et épatante Ksenia Sereda, la mise en scène. L’enfant filmé derrière la vitre embuée dans le tramway, l’enfant endormi dans le lit avec Iya, l’enfant silencieux face aux estropiés mimant des animaux, dont le sublime et tragique oiseau manchot ; Iya devant Masha à la lumière du briquet, Iya faisant fumer un mourant en lui soufflant la fumée, … : autant de scènes qui forcent l’admiration en raison de leur beauté visuelle rare et de leur créativité impressionnante.
Le récit est construit en trois parties : l’enfant et le lien maternel qui l’unit à Iya ; puis Masha et le lien affectif qui l’unit à Iya ; enfin l’arrivée du jeune Sacha qui veut épouser Masha et s’impose entre Masha et Iya. L’amour y est en jeu, mais à chaque fois frustré, interdit, étouffé. C’est que l’époque n’est pas propice : la fin de la deuxième guerre mondiale, les restrictions alimentaires, le manque d’hommes et … l’absence de droits LGTB et de gestation pour autrui. Ce dernier aspect surprend par son incongruité et son anachronisme, toutefois il est central dans le film – tendance oblige, diront les mauvaises langues. Quoiqu’il en soit, Balagov explore avec grandeur d’âme l’esprit féminin, à travers ces deux personnages aux tempéraments opposés, réunis par l’amour, la filiation et le devoir.
Une fresque ambitieuse aux « ailes de géant qui l’empêchent de marcher ».
Créée
le 19 déc. 2024
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