Jugez plutôt : un fugitif d'origine étrangère, Harvey Keitel, dont on ne connaitra jamais le nom, se réfugie dans une grande demeure où vit un homme aveugle, Michel Robin. Entre eux deux va se nouer une certaine complicité,jusqu'à ce que son neveu rapplique (Richard Anconina), accompagné de sa petite amie (Catherine Frot).
Ça me fait penser au casting tout aussi improbable de Canicule, tourné deux ans plus tard, où d'ailleurs Lee Marvin jouait lui aussi un homme en fuite et qui doit se cacher. Dans le cas de Keitel, c'est cause d'une blessure au bras, dont on ne connait pas la cause. D'ailleurs, on ne saura rien de ce dernier ; ses poursuivants, qui ne sont vraisemblablement pas des policiers, disent qu'il est échappé d'un asile psychiatrique, et lui non plus n'en parle pas à cet homme aveugle, joué avec calme par Michel Robin, que la cécité n'empêche pas d'être bavard. Ce qui n'est pas incompatible...
Harvey Keitel a fait l'effort de parler (de manière phonétique) en français, mais il y a quelque chose de bizarre que j'ai eu, en regardant l'enregistrement VHS : c'est parlé parfois en voix off, mais en anglais, sans aucun sous-titre. Certes, ça n'est pas très difficile à comprendre, il explique la galère dans laquelle il se trouve, mais je m'explique pas ce choix de ne pas traduire à minima.
Et puis arrivent dans la seconde partie Richard Anconina et Catherine Frot, le premier étant le neveu de l'homme aveugle, qu'il n'a pas l'air de porter à son cœur, sans doute pour avoir ses faveurs en vue d'un héritage (?), et à lui offrir une chemise de nuit dégueulasse. Le ton se veut un peu plus léger, la jeune Catherine Frot reprochant à son mec de ne faire que la baiser, c'est ce qu'elle dit, et elle semble attirée par l'homme en fuite, ce qui ne va pas plaire à Anconina, pour un final plutôt tragique.
Il faut dire que les deux acteurs y sont plutôt mauvais, y compris Frot, dont c'était le début de carrière, mais ils symbolisent aussi le fait que la psychologie des personnages est très peu développée ; on ne sait pas grande chose ni des uns ni des autres, quoique c'est appréciable pour celui de Keitel, l'homme de nulle part, mais il aurait fallu quelque chose de plus consistant. Car du coup, à part entendre dire que ce dernier a mal à son bras, qu'Anconina gueule sans arrêt sur sa copine, que cette dernière lui reproche ses ébats permanents alors qu'ils ne sont ensemble que depuis trois jours, et Michel Robin dire qu'il est aveugle, il ne se pas grand chose au final, excepté un gunfight plutôt réussi, mais qui montre aussi un certain manque de moyens.
Plutôt bizarre en raison du pedigree de ses acteurs, et dont on se demande comment Harvey Keitel a pu participer à un tel projet, Une pierre dans la bouche est ce qu'on appelle une véritable curiosité, comme le cinéma français des années 1980 en offrait à la pelle et qui reste à débusquer.