Pénétrer l’inextricable contexte du militantisme insulaire : tel est l’objectif ambitieux de Thierry de Peretti dans cette vaste fresque sur la Corse du début du XXIème siècle.
Alors que les scissions se multiplient, l’engagement d’une jeune recrue pose une question essentielle : définir la nature de l’engagement. Le grand banditisme est venu brouiller les cartes et la communication sur les actions militantes de plus en plus confuse.


Le sujet pourrait conduire à une saga sur le modèle du Parrain, mais Peretti évite cet écrasant aîné en décapant tout lyrisme. Dans un souci constant d’authenticité, il privilégie des comédiens locaux, un accent brut, et de longues discussions sur la marche à suivre pour honorer et sauver sa terre.


Le procédé fait souvent mouche : l’immersion est efficace, et l’aspect documentaire, surtout dans la première partie, bien mené. Les débats sont animés, et même si l’on voit bien que certains acteurs ne sont pas professionnels, leurs échanges parviennent à délimiter les enjeux multiples de leur lutte. On retrouve ainsi la dimension sociologique qu’avait Gomorra sur un sujet voisin, et Peretti parvient à relever le défi consistant à démêler l’écheveau complexe de cet imbroglio sur un film de moins de deux heures.


On peut toutefois être un peu déconcertés par la radicalité de certains choix, notamment celui du personnage principal, le plus souvent effacé, sorte de théoricien intellectuel, frêle derrière ses lunettes. Le contexte une fois posé, les développements de l’intrigue sont un peu confus et la structure en flash-back n’est pas toujours très lisible lorsqu’elle converge vers le présent.
Si l’on sent bien que cette sécheresse est assumée, elle empêche néanmoins à certains personnages de se déployer, et plombe de temps à autre le récit dans des dérives un peu dissertatives ; en résulte un ensemble un peu hétéroclite. De très belles scènes, surtout au départ, lorsque le silence est encore une option, font jouer la musique avec une science du cadre tout à fait pertinente, une atmosphère qu’on retrouvera sur le plan séquence final. Un chœur de femmes, authentique et enlevé, permettra aussi un renouveau du regard.


Si le résultat final n’est pas toujours à la hauteur de ses ambitions, Une vie violente garde pour lui sa singularité et ses partis-pris : débarrassé des oripeaux du classicisme, il parvient, au détour de quelques séquences, à mettre à nu la fragilité des individus face à la tragique et sempiternelle immoralité de l’humanité.


(6.5/10)

Sergent_Pepper
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le 20 août 2017

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Sergent_Pepper

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