Un film d’anticipation légèrement uchronique qui imagine un scénario catastrophe post guerre froide, comme si Hollywood avait du mal à tourner la page d’une époque angoissante mais des plus stimulantes cinématographiquement parlant. Cette plongée au sein d’un sous-marin nucléaire en pleine crise diplomatique est le terreau parfait pour y planter une intrigue « submergée » par son enjeu. Cette tension exacerbée par le huis-clos étouffant du submersible est souvent trop forcée mais elle fonctionne néanmoins suffisamment pour rendre le spectacle prenant. Les batailles navales représentent au final une part minime du métrage, les passages en question reprennent les poncifs habituels des films de sous-marin quitte à donner l’impression d’un déjà vu peu inspiré. Le vrai propos du film est d’ordre psychologique, une véritable guerre des nerfs que se livrent le commandant de bord et son second.
Cette opposition tant hiérarchique que philosophique fait toute la substance de l’intrigue, le film orchestre la discorde de façon machiavélique dans un crescendo de tension qui va se propager à tous les membres d’équipage. Ces derniers vont devoir choisir un camp sans pouvoir se réfugier dans la neutralité, c’est dans le feu de l’action et sous cet océan de « pression » et de sueur que Tony Scott révèle et met en exergue les personnalités de chacun. Derrière ce décorum moderne on est vraiment dans l’esprit de la tragédie antique, quand les deux antagonistes sont dans leur bien fondé l’un comme l’autre malgré leur divergence profonde. Cette relative équité de traitement moral entre les deux partis fait toute la force du film là où les productions hollywoodiennes similaires adoptent ordinairement un manichéisme plus commode, en cela le film sort vraiment des rangs surtout par rapport à la marche de manœuvre très limitée que peut se permettre un tel blockbuster (d’ailleurs la marine U.S refusa d’aider la production du film parce qu’il y était question de mutinerie). Tout ceci n’aurait pas été possible sans l’interprétation viscérale de Gene Hackman en capitaine autoritaire et inflexible dans ses convictions qui étouffe ses hommes de son charisme et qui veut les tenir en laisse comme son petit toutou qu’il trimballe partout. Mais c’est avant tout le travail scénaristique très bien ficelé qui tient de bout en bout ce thriller psychologique en eaux profondes, les recherches documentées confèrent une crédibilité au film et les nombreuses réécritures effectuées par plusieurs scénaristes (dont un certain Quentin Tarantino) apportent du relief à l’ensemble.

Créée

le 9 déc. 2021

Critique lue 425 fois

17 j'aime

5 commentaires

archibal

Écrit par

Critique lue 425 fois

17
5

D'autres avis sur USS Alabama

USS Alabama
archibal
8

Sous pression

Un film d’anticipation légèrement uchronique qui imagine un scénario catastrophe post guerre froide, comme si Hollywood avait du mal à tourner la page d’une époque angoissante mais des plus...

le 9 déc. 2021

17 j'aime

5

USS Alabama
drélium
7

Ah là bah ma petite dame, on est point sorti...

Je viens de le revoir et je suis parfaitement d'accord avec le barbu... Et pourtant, j'adore les films de sous-marins et j'ai aimé ce film. Paulo me l'avait prédit quand j'ai vu "Sueurs froides" :...

le 30 août 2012

17 j'aime

9

USS Alabama
ludovico
9

Un film beaucoup plus subtil qu'il n'y parait

Nous partageons avec quelques-uns un culte étrange pour le Film de Sous-Marin. Genre mineur (en nombre de films), le Film de Sous-Marin exerce une fascination certaine, difficilement explicable au...

le 28 juil. 2012

13 j'aime

3

Du même critique

Mad Max - Fury Road
archibal
10

Les fous du volant

Enfin un film qui tient ses promesses, les multiples bandes annonces faisaient plus que saliver et je redoutais qu'elles aient défloré trop de choses sans parler de la déception qui suit...

le 14 mai 2015

93 j'aime

9