En quelques mots:
Une équipe de tournage réalise un documentaire sur quatre vampires vivant en colocation dans la banlieue de Wellington, en Nouvelle-Zélande.
En un peu plus:
A en croire Stephen King et son Anatomie de l’horreur, la figure du vampire serait l’un des trois grands archétypes du cinéma d’horreur. Pour celles et ceux qui croient aux preuves par le nombre, le plus illustre d’entre eux, le comte Dracula, s’affiche à lui seul dans largement plus de cent films brodant avec plus ou moins de bonheur sur le roman épistolaire de Bram Stoker. C’est beaucoup.
Ainsi Nosferatu, eine Symphonie des Grauens de Murnau, Lost Boys de Schumacher, Bram Stoker’s Dracula de Coppola, Interview With the Vampire de Jordan, ou *tousse* Twilight d’Hardwicke ne sont-ils que la pointe d’un iceberg plongé dans pratiquement toutes les cultures (de Thirst à Morse en passant par Dracula au Pakistan), toutes les époques (du Nosferatu de 1922 au Renfield prévu pour 2023) et tous les genres cinématographiques, fussent-ils les plus improbables (weird western, science-fiction, blaxploitation, sans oublier jiangshi).
What We Do in the Shadows est une de ces curiosités se trouvant sous la ligne de flottaison qui mérite clairement le détour. Ce film néo-zélandais de Jemaine Clement et Taika Waititi s’inscrit dans le genre de la comédie vampirique, tout en en proposant un traitement radicalement différent des farces teintées de gore et d’érotisme qui en composent l’ordinaire.
Le sel particulier de sa déconstruction du mythe du vampire vient du fait que, contrairement à ce que son odieuse version française pourrait laisser croire, le film est une lettre d’amour au genre. Sans s’enfermer dans la parodie, il en convoque les grandes figures pour les vivifier et les transformer en les abreuvant d’ordinaire et de banalité en se servant du philtre du documenteur.
Nécessairement décalés au cœur de l’éphémère, égarés par l’entre-soi, perdus dans la modernité, les immortels protagonistes témoignent tant par leur quotidien que par des témoignages face caméra d’un vampirisme insoupçonnable jusqu’alors. C’est que What We Do in the Shadows se déroule essentiellement durant les moments creux, lorsque le vampire cesse d’être un séducteur, un prédateur ou un adversaire pour devenir un quidam surnaturel qui fait ses courses, s’adonne au tricot, ou se dispute pour savoir qui doit faire la vaisselle.
Ce regard sur les coulisses et l’intimité inédite qui en découlent devraient finir par désacraliser l’image du vampire. Ce n’est pourtant pas ce qui arrive : tout au long du récit, tant les personnages principaux, les humains qui gravitent autour d’eux ou les spectateurs ne peuvent se défaire tout à fait des fantasmes que véhicule l’image du vampire.
Cela sans doute parce que la force des grands mythes consiste à faire de tout crépuscule une aube nouvelle
Et en quelques images:
Bandes-annonce alternatives.